La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Le Cirque contemporain en France

Tout est bien !

Tout est bien ! - Critique sortie
© Ivika Meister

Fondation BNP Paribas / Biennale Internationale des Arts du Cirque Provence Alpes Côte d’Azur

Publié le 11 novembre 2014

Auguste danseur et jongleur virtuose, Nikolaus Holz invente un cirque entre humour et burlesque, théâtre et jonglage. En 1998, il a fondé la compagnie Pré-o-coupé, avec laquelle il a créé, en 2012, Tout est bien ! Catastrophe et bouleversement.

« Ce qui est précaire est beau. »

On dit de votre travail qu’il est un cirque de la crise. Pourquoi ?

Nikolaus Holz : Le label théâtre de la crise est devenu un cliché. Il faudrait davantage parler d’un théâtre du sublime. Un artiste est témoin de son époque, qu’il le veuille ou non. Le spectacle d’avant Tout est bien !, Raté-Rattrapé-Raté, créé en 2006-2007, paraissait prémonitoire de la crise. Aujourd’hui, ce qui est à penser et à créer, c’est l’idée et la forme de l’après-crise. Depuis vingt-cinq ans, je pratique un cirque empêché. Le cirque, c’est toujours de grandes contraintes. Je suis un grand jongleur, soit, mais un phoque ferait ce que je fais mieux que moi. Un singe serait meilleur qu’un trapéziste. Le cirque empêché, c’est une forme qui ajoute des contraintes absurdes : que devient un équilibriste sans appui, comment utiliser une corde volante si on n’a pas de hauteur ? Nous sommes arrivés à des expériences extrêmement intéressantes… Les chapiteaux contemporains ont tendance à devenir des châteaux. Nous, nous choisissons de faire le contraire. Notre chapiteau ne tient pas, il est dépourvu d’agrès… Le spectacle relève de la même condition que nous : précaire.

Quel est l’intérêt de cette précarité ?

N. H. : Ce qui est précaire est beau, comme est beau le danger quand on voit qu’il est maîtrisé. Le cirque, c’est le danger. Le danger nous dépasse. Face à lui, il faut être ensemble. Ensemble non pas comme une troupe de surhommes, mais comme des hommes, mal foutus, à l’image du cirque. La chute est sublimée par l’exploit : un salto ne servirait à rien dans un monde qui n’a pas besoin de l’homme. Pendant que chacun protège son petit statut dans son coin, le fascisme irrigue notre société et met en place un monde d’exclusion. Dans ce monde ainsi fait, le cirque est une issue. Les issues se trouvent là où l’homme est inefficace, mal foutu, pas fait pour être debout. Le cirque raconte ces histoires-là à travers l’exploit et le rire. Dans ce monde trouble, il faut rappeler l’impertinence et l’innocence du clown. Le monde efficace n’a plus besoin de l’homme. Mais l’homme a toujours envie de raconter des histoires et de faire travailler l’efficacité au service de son inefficacité.

Qui accueille cette inefficacité revendiquée ?

N. H. : Nous ne serions rien sans structures de diffusion. Archaos et le Pôle Cirque Méditerranée sont comme des grands frères qui nous soutiennent. Ceux qui programment ce genre de spectacle, comme le festival d’Istres, doivent être encouragés, ils font entièrement partie de l’aventure.

 

Propos recueillis par Catherine Robert

 

 

A propos de l'événement

Festival Les Elancées à Istres
du vendredi 13 février 2015 au dimanche 15 février 2015


Site : www.preocoupe-nikolaus.com

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