Mamu Tshi, portrait pour Amandine et My body, my archive de Faustin Linyekula
Artiste associé à Chaillot, le chorégraphe [...]
Une création autour de la féminité masculine, que Thomas Lebrun questionne à l’aune de sa rencontre avec la communauté Muxes au Mexique.
Cette pièce est-elle née de votre voyage au Mexique ?
Thomas Lebrun : J’avais d’abord vu il y a quelques années un reportage sur les Muxes qui m’avait interpellé, car ce sont des hommes « au cœur de femmes ». Ensuite, ma rencontre avec Raymundo Ruiz González, chercheur en danses traditionnelles mexicaines qui étudiait la notation Laban, m’a redynamisé, car il connaissait les Muxes. Parallèlement, je constatais qu’il existait dans ma compagnie un certain nombre de danseurs qui sont féminins. Féminins à l’intérieur. Et nous sommes allés tous ensemble au Mexique.
Que découvrez-vous là-bas ?
T.L. : Mes recherches en amont me montraient un peu tout et son contraire, il fallait donc essayer de comprendre et aller à leur rencontre. Les Muxes sont très regroupées au sud du Mexique, dans la région d’Oaxaca. Nous avons rejoint Juchitan, « la ville des fleurs », après six heures de route. Les Muxes ont toujours existé dans la culture zapotèque, elles sont donc acceptées, mais dès lors qu’elles deviennent de plus en plus féminines, cela peut créer des tensions dans la société mexicaine. Elles peuvent être « habillées », notamment du costume féminin traditionnel très fleuri et brodé à la main, ou non, et garder alors un maquillage et des vêtements d’homme. Leur rôle est de s’occuper de la famille, des enfants, des parents. Même s’il a aujourd’hui évolué, leur mode de vie est très codifié, elles ne se marient pas, font du commerce, de la broderie…
Avez-vous la volonté de faire une pièce « documentaire » ?
T.L. : Au début, j’ai souhaité en effet aborder la question de la féminité chez l’homme. Partir d’elles, de leur façon d’être, et voir comment en Occident même cette féminité chez l’homme est jugée ou pas, acceptée ou pas, cachée ou pas… Il ne s’agit pas d’aborder la question de l’homosexualité, j’insiste là-dessus. Mais je suis plein de questionnements car j’ai découvert une grande complexité. Depuis quelques années, elles ont été très médiatisées, elles sont en ouverture de grands événements et représentent la liberté. Elles font le défilé de la Gay Pride même si elles ne sont pas gay. Certaines se sont lancées dans la politique ou dans la performance, d’autres partent en ville et se prostituent pour vivre. Je me suis retrouvé à ne plus savoir quoi penser des Muxes, et c’est finalement ce sentiment de perplexité qui guide ma pièce.
Allez-vous traiter cette question du costume ?
T.L. : Oui, mais en inversant ce que j’avais en tête au début. Je vais vers une forme d’effeuillage général. Mais sans que l’on sache ce qu’il y a sous les fleurs !
Propos recueillis par Nathalie Yokel
à 21h. Tél. : 02 18 75 12 12.Dans le cadre du Festival Tours d’Horizons.
Artiste associé à Chaillot, le chorégraphe [...]