La facture historique des instruments à vent, de la recherche à la sculpture
Dans l’atelier d’Henri Gohin se construisent flûtes à bec, hautbois et bassons de l’époque renaissance et baroque.
Entre les stocks de bois, les machines à tourner et l’outillage, il est parfois difficile de se frayer un chemin dans l’atelier d’Henri Gohin. A quelques kilomètres de Pontoise, cet artisan construit chaque année une quarantaine d’instruments : des flûtes à bec, mais aussi des hautbois et des bassons, que joueront les spécialistes de l’interprétation historique. Hugo Reyne, Denis Raisin-Dadre ou Sébastien Marq figurent ainsi parmi ses fidèles clients. « Construire une flûte à bec, ça n’a l’air de rien, remarque Henri Gohin, mais c’est un savoir-faire bien particulier. Ce n’est pas un hasard si nous sommes si peu nombreux à en fabriquer ». Sa méthode de travail ‘ « Je n’ai pas de théorie précise, je travaille intuitivement. » Comme tous les grands facteurs, Henri Gohin réalise lui-même l’ensemble des étapes nécessaires à la construction des instruments. A commencer par la prise de mesures, pratiquée sur les instruments d’époque exposés dans les musées européens. « On s’éloigne le moins possible de l’original, mais il faut être pragmatique. On adapte ainsi le diapason ou le tempérament. L’essentiel, c’est que l’instrument ne perde pas son caractère », explique Henri Gohin.
Les étapes de finition
Un des aspects déterminants dans l’élaboration d’un instrument consiste à trouver le meilleur bois possible. C’est souvent dans les scieries, mais aussi dans des jardins personnels, qu’Henri Gohin déniche les poiriers, érables ou oliviers qui lui serviront à construire ses flûtes. Une fois le bout de bois débité, celui-ci se retrouve sur un tour, une machine permettant d’ébaucher la forme de l’instrument. Vient ensuite le moment de l’alésage, où le facteur perce l’intérieur du bois. Enfin, après le perçage des trous, ce sont les étapes de finition, comme le polissage. « C’est un peu de la sculpture : les formes doivent être les plus harmonieuses possibles », nous dit Henri Gohin, avant d’ajouter que « la grande difficulté n’est pas de façonner mais d’harmoniser ». Il faut en effet que l’instrument sonne bien et juste. « C’est un équilibre bizarre acoustiquement, reconnaît Henri Gohin. La flûte est l’un des rares instruments où le son n’est pas créé par l’interprète, mais donné directement par l’instrument ». D’où la démarche essentielle de facteurs comme Henri Gohin, situés à la frontière entre l’art et l’artisanat.
A. Pecqueur