Un théâtre des corps, rencontre avec Padrig Vion
Entretien / Padrig Vion
Théâtre Ouvert / texte et mise en scène Padrig Vion
Publié le 25 octobre 2024 - N° 326
Il met lui-même en scène ses textes, dans un désir de théâtre vivant, sincère, d’une précision musicale. Padrig Vion nous ouvre le champ de ses inspirations.
Comment est né votre désir d’écriture ?
Padrig Vion : Au conservatoire, où j’ai commencé à écrire des textes pour les autres élèves, on faisait une création par mois. Ça me plaisait beaucoup de saisir certaines choses des gens que je côtoyais pour les transformer en matière à jouer. Ensuite, est venu le moment où j’ai été happé par la classe sociale de Louis Battistelli et Lomane de Dietrich, deux camarades de ma promotion. Venant d’un milieu populaire de province, très éloigné de la culture, j’ai toujours eu une forme d’attirance pour la bourgeoisie. J’ai donc écrit une capsule pour eux deux, qui est devenue mon premier vrai texte de théâtre : Drame Bourgeois.
Quel regard portez-vous sur votre écriture ?
P.V. : Ce qu’il faut dire, d’abord, c’est que je n’écris que pour des interprètes que je connais, avec pour ambition de les emmener dans des endroits de jeu, de dissonance, d’amplitude… Mon théâtre est un théâtre d’actrices et d’acteurs, un théâtre des corps qui s’appuie sur des pièces conçues comme des partitions musicales. Mon écriture est très organique. Elle essaie toujours d’aller à l’essentiel. Les personnages qui l’habitent disent ce qu’ils vivent, ce qu’ils voient, ce qu’ils pensent, ce qu’ils ressentent…
« Ces deux spectacles explorent la façon dont la pensée et les sentiments s’articulent. »
Dans Drame Bourgeois et dans Murmures, il est question de ruptures…
P.V. : Oui, dans ces deux pièces — que j’ai imaginées pour Lomane de Dietrich, qui joue Drame Bourgeois aux côtés de Louis Battistelli et Murmures aux côtés de Mélodie Adda — j’ai essayé de construire des langages qui rendent compte de la déconstruction des rapports humains, en allant vraiment au bout de ce qui peut être dit et ressenti. Ces deux spectacles explorent la façon dont la pensée et les sentiments s’articulent. Pour cela, ils vont chercher, avec les interprètes et le public, dans les tréfonds de l’humain. Comme l’a écrit Jean-Luc Lagarce, dont j’ai découvert l’œuvre lorsque j’étais élève au Cours Florent — ce qui fut pour moi un véritable choc, une rencontre fondatrice — : « raconter le Monde, ma part misérable et infime du Monde, la part qui me revient ». C’est ce que j’ai voulu faire dans Drame Bourgeois et dans Murmures, afin d’échapper à la gratuité des choses et de donner à voir, à entendre, la sincérité du vivant.
Manuel Piolat Soleymat
A propos de l'événement
du lundi 2 décembre 2024 au samedi 14 décembre 2024Théâtre Ouvert - Centre national des dramaturgies contemporaines
159 avenue Gambetta, 75020 Paris.
Du lundi au mercredi à 19h30, le vendredi à 20h30 : Drame Bourgeois (les jours pairs) ; Murmures (les jours impairs). Le samedi : Drame Bourgeois à 18h ; Murmures à 20h.
Tél. : 01 42 55 55 50.