Entretien Blandine Savetier
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Focus -208-Théâtre National de Toulouse
Jacques Nichet présente Tous ceux qui tombent, une pièce radiophonique écrite par Samuel Beckett pour la BBC, en 1956.
C’est l’histoire de Madame Rooney : une petite vieille qui se rend « à pas traînants » à la gare de Boghill pour aller chercher Dan, son mari aveugle qui doit arriver par le « rapide de midi trente ». Elle vit ce parcours comme un véritable calvaire. « Sortir, de nos jours, lance la vieille dame au facteur qu’elle rencontre en chemin, c’est le suicide assuré. Mais rester chez soi, Monsieur Tyler, rester chez soi, qu’est-ce que c’est ? C’est s’éteindre à petit feu. » Tout juste remise d’une maladie qui l’a tenue cloîtrée durant de longs jours, Madame Rooney continue péniblement, lentement, son trajet, croise Mr Slocum, le directeur des Courses, Mademoiselle Fitt, une bigote du village, Mr Barrell, le chef de gare… Cette marche lui semble interminable. Lorsqu’elle arrive enfin à son point de destination, à midi trente-six, le train de son époux n’est pas encore en gare… Ecrite en 1956 à la demande de la BBC, Tous ceux qui tombent est la première pièce radiophonique de Samuel Beckett.
Une expérience de théâtre non pas à voir, mais à entendre
Dans une lettre à son ami l’écrivain Aidan Higgins, l’auteur revient sur cette commande : « Invité à écrire une pièce radiophonique pour [la BBC]. Tentant : pieds qui traînent, souffle court, bruits de roue, échange d’imprécations (…), vieilles juments apathiques et prêtes à mettre bas rossées par les villageois… » Aujourd’hui, Jacques Nichet s’empare de cet espace sonore théâtral à l’intérieur duquel circulent onze « voix fantômes », parmi lesquelles celles d’Edith Scob, de Mickael Lonsdale et de Dominique Pinon. Le public sera invité « à mettre un masque sur les yeux comme pour un long voyage vers un pays imaginaire, explique le metteur en scène, vers une Irlande perdue que Beckett retrouve en renouant son écriture à une langue anglaise abandonnée depuis longtemps ». Ainsi plongés dans le noir, c’est grâce aux seuls paysages sonores que les spectateurs-auditeurs suivront ce road-movie drolatique, en forme de conte cruel, qui porte un éclairage sans fard sur la condition humaine.
Manuel Piolat Soleymat
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