La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -325-Toute la richesse des arts vivants : un nouveau projet pour Le Quai à Angers

S’ouvrir aux ailleurs et aux autres, rencontre avec Marcial Di Fonzo Bo

S’ouvrir aux ailleurs et aux autres, rencontre avec Marcial Di Fonzo Bo - Critique sortie  Angers Le Quai - Centre dramatique national Angers Pays de la Loire
(© Christophe Martin – Le Quai) : Le comédien et metteur en scène Marcial Di Fonzo Bo, directeur du Quai.

Entretien

Publié le 25 septembre 2024 - N° 325

Fidèle aux engagements qui ont nourri son action à la Comédie de Caen, Marcial Di Fonzo Bo a imaginé, pour Le Quai, un projet organisé autour de trois grands axes : le partage de l’outil de travail, les échanges internationaux, la transmission intergénérationnelle.

Quelles grandes orientations souhaitez-vous impulser au Quai ?

Marcial Di Fonzo Bo : Le projet pour lequel j’ai été nommé à la direction du Quai est à la fois différent  et dans la continuité de ce que j’ai réalisé à Caen. Bien sûr, lorsqu’on envisage de diriger un nouveau théâtre, il faut se déplacer et interroger la particularité de ce lieu et de son territoire. Avec Jacques Peigné (ndlr, directeur délégué du Quai), je vais donc réinventer les principes qui m’ont guidé par le passé : le partage de l’outil avec d’autres artistes, notamment les artistes associés ; l’ouverture à l’international, notamment grâce à un nouveau Pôle Européen de Production ; la transmission aux nouvelles générations.

Ce dernier axe s’appuie sur la création d’une Académie européenne expérimentale…

M.D.F.B. : Oui. Nous sommes partis du constat qu’il manque un Conservatoire supérieur d’art dramatique dans la région Pays de la Loire. De plus, nous partageons nos locaux avec le Centre national de danse contemporaine. Nous avons donc eu l’idée de faire du Quai un lieu repéré de transmission, un lieu qui devienne un véritable vivier de jeunes artistes. Cette Académie réunira une dizaine d’étudiantes et d’étudiants venus de divers horizons — la danse, le théâtre, la performance… — en collaboration avec d’autres maisons de création européennes comme le Théâtre national de Norvège, le Piccolo Teatro de Milan, des partenaires en Belgique, en Suisse, en Espagne… Les choses sont en train de se mettre en place. La mise en scène du Songe d’une nuit d’été, que je vais créer en 2025/2026 et pour laquelle je travaillerai avec de jeunes Italiens, Français, Suisses, Belges, Norvégiens et peut-être Catalans, servira de préfiguration à ce dispositif, qui débutera formellement en 2026/2027.

« Mélanger les langues, les histoires, les cultures représente une immense richesse. »

Au-delà même de cette académie, vous souhaitez favoriser les échanges avec des artistes venus d’autres pays. En quoi cette ouverture vous semble-t-elle essentielle ?

M.D.F.B. : Je suis né et j’ai grandi à Buenos Aires, une ville cosmopolite au sein de laquelle se côtoient des communautés issues de toutes sortes de pays. Pour moi, il est assez naturel de défendre la force que constitue le brassage. Et puis, j’ai envie de rappeler que, jusqu’à preuve du contraire, la France est toujours une terre d’accueil. Mélanger les langues, les histoires, les cultures représente une immense richesse. Mon idée n’est d’ailleurs pas uniquement de programmer des spectacles en langues étrangères, mais également de recréer, en français, des spectacles nés ailleurs, comme c’est le cas pour Portrait de l’artiste après sa mort (ndlr, voir article ci-après). C’est une autre façon de penser le croisement international, une manière de travailler plus économe, plus intelligente, qui tient compte des enjeux de la transition écologique.

Pouvez-vous nous dire quelques mots de la saison 2024/2025 ?

M.D.F.B. : C’est une saison très riche, entièrement paritaire du point de vue des moyens alloués aux artistes femmes et artistes hommes. Elle se compose de 60 propositions. Nous avons retrouvé les chiffres d’avant Covid, ce qui est une excellente nouvelle. Le volet international se concentre à l’automne. Nous profitons de la présence en France de certaines des équipes invitées l’été dernier au Festival d’Avignon pour donner à notre programmation automnale une couleur latino-américaine. Nous accueillons Los Días afuera de Lola Arias, un Hamlet venu du Pérou (ndlr, mis en scène par Chela de Ferrari), Reminiscencia et Minga de une casa en ruinas, deux spectacles chiliens… Cette saison est très éclectique. Elle présente des créations de grands maîtres, comme Alain Françon ou Matthias Langhoff, mais aussi des propositions d’artistes plus jeunes comme Rémi Fortin et Arthur Amard (ndlr, avec Le Beau Monde). Et puis, nous accueillons Angers Nantes Opéra, avec Il Nabucco de Michelangelo Falvetti, qui signe le retour de la musique baroque au Quai.

Vous-même mettez en scène Dolorosa – Trois anniversaires ratés

M.D.F.B. : Oui, c’est une variation contemporaine des Trois Sœurs écrite par l’autrice allemande Rebekka Kricheldorf. Elle explore les sujets développés par Tchekhov à partir d’aujourd’hui. Il s’agit d’une pièce à la fois assez pessimiste et extrêmement drôle. Dolorosa déploie une langue très construite qui constitue une partition passionnante pour les interprètes qui s’en emparent (ndlr, Juliet Doucet, Marie-Sophie Ferdane, Jean-Christophe Folly, Elsa Guedj, Camille Rutherford et Alexandre Steiger). Dans ma mise en scène, j’insère des passages de la pièce originale de Tchekhov, ce qui permet de mettre en lumière le travail de réécriture qui est à l’œuvre dans cette adaptation.

 

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

Dolorosa – Trois anniversaires ratés
du mardi 1 octobre 2024 au vendredi 4 octobre 2024
Le Quai - Centre dramatique national Angers Pays de la Loire
Cale de la Savatte, 49100 Angers.

Tél. : 02 41 22 20 20.

www.lequai-angers.eu

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