Pluralité, fidélité et découverte : trois lignes de force du Printemps des Comédiens, sous la houlette de Jean Varela

« De l’interprétation des mythes antiques à la radicalité de la performance, une grande diversité de gestes créatifs est proposée, jusqu’aux plus audacieux, qui ne correspondent à aucune attente. Comme toujours, la dimension internationale s’affirme, avec cette année un accent particulier sur l’Amérique du Sud en signe de solidarité avec le peuple argentin. Venu de Buenos Aires, Guillermo Cacace propose Gaviota, une variation autour de La Mouette interprétée par des femmes et présentée dans une baraque construite sous la pinède. Avec Villa, qui évoque la Villa Grimaldi où furent torturés les opposants à Pinochet, le Chilien Guillermo Calderón interroge la transmission et la matérialité de la mémoire collective. Nous nous inscrivons dans la fidélité aux artistes – Cyril Teste, Krystian Lupa, Jean Bellorini, Jean-François Sivadier, Emma Dante, Marina Otero… -, en laissant place aux découvertes. Le maître Krystian Lupa présente avec ses comédiens polonais Balkony – Pieśni Miłosne, qui rassemble les univers de Garcia Lorca et Coetzee. En ouverture de festival, Cyril Teste après une merveilleuse Mouette nous amène Sur l’autre rive (variation théâtrale) qui s’inspire librement de Platonov afin d’interroger la filiation et le poids du temps. J’aime cette continuité de mémoire qui habite le public, qui fait émerger dans nos imaginaires toutes sortes de dialogues.

Effervescence créative

Nous retrouvons aussi Wajdi Mouawad, avec Journée de noces chez les Cromagnon, ainsi que Joël Pommerat et son adaptation de Marius de Pagnol qui s’extrait de son époque. Autre pièce des années 1930, Liliom de Ferenc Molnár mise en scène par Myriam Muller éclaire ici les violences et silences de la fable sociale. Création très attendue, Kill me de Marina Otero interroge la maladie mentale qui l’a saisie en convoquant le fantôme de Nijinski. Imaginée à partir d’Antigone de Sophocle,  Les Messagères de Jean Bellorini met en lumière entre fiction et réalité les comédiennes de l’Afghan Girls Theater Group. Dans un autre registre, le cabaret Le Secret de Jérôme Marin offre une bulle de folie subversive. Nous accordons aussi une grande attention à la jeunesse avec les spectacles de Georges Lavaudant, Gildas Milin et Katia Ferreira qui donnent voix aux talents de l’École Nationale Supérieure d’Art dramatique de Montpellier, ou avec le portrait des Atrides que Jean-François Sivadier façonne avec des comédiens sortis du Conservatoire National Supérieur de Paris. Et six universités européennes présentent des travaux sur l’histoire de leur pays en lien avec l’Europe, la résistance… Tout concorde afin que vive et rayonne la création. »

Propos recueillis par Agnès Santi