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Focus -308-En direct avec les artistes Génération Spedidam : Pascal Contet

Pascal Contet, l’accordéon hors frontières

Pascal Contet, l’accordéon hors frontières - Critique sortie  Paris

génération spedidam / pascal contet

Publié le 14 février 2023 - N° 308

À soixante ans, Pascal Contet, figure majeure de l’accordéon contemporain depuis plus de trente ans, n’en est pas à l’heure des bilans. Création de Weber à vif à La Scala en mars, reprise de Fiesta Latina et, cet été, sixième édition de son festival Fort en musique, cette année 2023 illustre plus que jamais une soif d’expériences artistiques « hors frontières ». Entretien avec un musicien caméléon qui se nourrit de rencontres.

Comment est né le trio Weber à vif ?

Pascal Contet : Il a été créé à partir d’une proposition de Jacques Weber : improviser, avec Greg Zlap à l’harmonica, sur un florilège littéraire allant de Hugo à Maïakovski et Artaud. Je n’ai jamais eu de plan de carrière : mes projets sont le fruit de rencontres, avec la danse, l’art numérique, et ici le théâtre. J’avais déjà l’expérience du duo aux côtés de partenaires au long cours comme Marie-Christine Barrault, Andréa Ferréol, ou François Marthouret et Dieudonné Niangouna. Cette forme en trio est nouvelle pour moi, qui plus est avec un musicien qui vient d’un autre univers, le blues et le rock. Au-delà de ces différences, nous avons trouvé une connivence, renforcée par la proximité du son de nos deux instruments.

« Un dialogue entre des créativités qui se nourrissent l’une de l’autre. »

Qu’est-ce qui vous porte vers ces formes hybrides ?

P.C. : Ce qui m’intéresse dans ces lectures, c’est de capter en musique, comme un photographe, le rythme de l’instant, dans un esprit de spectacle vivant où chaque représentation est unique. L’improvisation y est une composition éphémère qui se développe dans un dialogue entre des créativités qui se nourrissent l’une de l’autre, où chacun est à la fois musicien et comédien. La musique s’épanouit autour du texte à la manière d’un lierre qui entoure le tronc d’un arbre sans jamais l’étouffer. C’est aussi un moyen d’aller au-delà du public habituel de connaisseurs.

Comment développez-vous les échanges entre les répertoires et les pratiques ?

P.C. : Le premier exemple qui me vient est mon duo avec la contrebassiste Joëlle Léandre qui m’a libéré dans ma pratique de l’improvisation, et avec laquelle je prépare un cinquième album pour 2024. Et plus proche de nous, avec Fiesta Latina, que je reprends à Paris aux Invalides en mai avec le Quatuor Strada et le contrebassiste Yann Dubost, j’explore le cousinage avec le bandonéon et Piazzolla, dans l’esprit de la transcription, du côté des origines du tango et des milongas. Ce work in progress évolue au gré des effectifs : je le reprendrai cet automne avec l’Orchestre de Picardie, puis avec celui de l’Opéra de Limoges.

Quel rapport entretenez-vous avec la transcription ?

P.C. : Quand j’ai commencé, on n’en comprenait pas l’intérêt pour l’accordéon. Aujourd’hui, grâce à la reconnaissance des ressources de l’instrument, ce tabou a sauté parmi la jeune génération. Le déclencheur pour moi a été le travail avec Bernard Cavanna autour des lieder de Schubert.

« L’accordéon a une couleur qui donne un goût spécifique dans l’orchestration. »

Comment ce côté caméléon de l’accordéon se traduit-il dans les œuvres que vous créez ?

P.C. : Le double concerto Double Act de Donghoon Shin, que je vais jouer en Corée en avril et la saison prochaine avec l’Orchestre national de Bretagne, offre un magnifique exemple de cette identité double, dans une sonorité quasi fusionnelle et singulière avec le sheng, orgue à bouche chinois, et avec l’orchestre. L’accordéon a une couleur qui donne un goût spécifique dans l’orchestration, même si on ne l’isole pas, un peu comme dans une alchimie culinaire.

Peut-on voir votre festival Fort en musique comme un résumé de votre démarche artistique ?

P.C. : Après cinq premières éditions qui ont mis l’accent sur les liens entre texte et musique, nous offrons cette année un coup de projecteur sur les instruments rares et non conventionnels, avec un voyage parmi les traditions non-occidentales. Les concerts seront présentés par l’humoriste Alex Vizorek et seront enrichis par des échanges avec les artistes. Le but est d’encourager la curiosité du public, dans un partage inventif à rebours des grosses machines et des tournées clefs en main.

Propos recueillis par Gilles Charlassier

A propos de l'événement

Weber à vif
du mercredi 8 mars 2023 au dimanche 30 avril 2023


du 8 au 16 mars et du 11 au 30 avril 2023 à La Scala-Paris, et à Avignon en juillet 2023.

Fiesta Latina, le 16 mai 2023, Cathédrale Saint-Louis-des-Invalides

Festival Fort en musique, du 18 au 20 août 2023 dans le Territoire de Belfort.

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