Heroes, prélude
Au Panthéon, Radhouane El Meddeb a [...]
Focus -232-Centre des Monuments Nationaux
Président de l’établissement public depuis trois ans, Philippe Bélaval accompagne la création de spectacles vivants au sein des monuments, permettant une passionnante redécouverte du lieu autant que du geste artistique.
Pourquoi avoir décidé de programmer de la danse au sein des monuments ?
Philippe Bélaval : Moins fréquente que les lectures ou les concerts parce qu’elle nécessite des conditions de travail et d’expression spécifiques, et aussi parce qu’il me semble que le spectacle vivant est encore admis par la petite porte dans les monuments, la danse m’intéresse par sa créativité et son occupation de l’espace, par la tension générée entre le mouvement à la fois libre et contrôlé, et le statisme riche d’Histoire des monuments. La danse est immédiatement accessible à tout public, y compris aux étrangers ne parlant pas notre langue. Beaucoup de chorégraphes aiment travailler dans l’espace public, et l’espace monumental offre un cadre original permettant d’interroger de façon sensible à travers le mouvement les thèmes de la mémoire et de l’héritage. Il ne s’agit pas seulement de proposer une programmation éclectique, il s’agit surtout de créer un lien profond entre l’œuvre et le monument qui devient source d’inspiration, et de construire une démarche porteuse de sens, d’émotion, de rêve, éclairant le présent par le passé, revisitant l’Histoire et le temps parsemé de trésors architecturaux par le geste artistique et le ressenti. C’est formidable de favoriser la rencontre pour donner naissance à des oeuvres nouvelles… Je suis très heureux que des talents tels que Radhouane El Meddeb, Nathalie Pernette, Yoann Bourgeois et Thomas Lebrun aient accepté de jouer le jeu et espère que le public sera au rendez-vous. Nous concevons les monuments comme des lieux de rencontre et de partage, et ces quatre créations sont des occasions rares de les découvrir différemment.
Comment les artistes ont-ils investi les monuments ?
P. B. : Chacun met en oeuvre sa propre approche. Radhouane El Meddeb a présenté Heroes, Prélude au Panthéon mi-avril, un projet fort créé dans un lieu emblématique, qui sera prolongé par une pièce plus longue présentée à l’automne 2015 au CentQuatre. Fascinée par les gisants, Nathalie Pernette présente en juin La Figure du Gisant, premier volet de Une Pierre presque immobile à l’Abbaye de Cluny, qui sera repris à la Basilique Saint-Denis. Thomas Lebrun a conçu Où chaque souffle danse nos mémoires, à découvrir en septembre au Château de Azay-le-Rideau, au Château de Châteaudun et au Palais Jacques Cœur de Bourges. Le projet Cavale de Yoann Bourgeois sera proposé au Mont Dauphin et à La Turbie. Artistes, publics et pourquoi pas agents des monuments peuvent être mis en jeu. Nous espérons poursuivre ce type de rencontres l’an prochain, avec d’autres monuments et encore plus d’artistes, et peut-être explorer aussi le cirque. J’ai déjà reçu plusieurs dossiers de chorégraphes qui veulent danser au Panthéon !
Au-delà de la mise en valeur du patrimoine et de la conquête de nouveaux publics, est-ce aussi une manière inhabituelle de partager une culture commune ?
P. B. : Si nous sommes convaincus que la culture et l’art sont de nature à construire les individus et la société, il faut les utiliser comme une arme pour lutter contre les dérives. C’est un discours de valeurs qu’il faut tenir. Quand le monde montre surtout sa laideur, il me paraît essentiel de ne négliger aucune occasion de montrer la beauté. La rencontre avec la beauté et l’émotion ainsi créée est une manière de s’élever, et cette rencontre s’adresse à tous.
Propos recueillis par Agnès Santi
Tél : 01 44 61 21 50. www.monuments-nationaux.fr
Au Panthéon, Radhouane El Meddeb a [...]