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Focus -317-Matière(s) Urbaine(s) : les matières à penser d’Anne Nguyen aux Métallos

Matière(s) Urbaine(s) : les matières à penser d’Anne Nguyen aux Métallos

Matière(s) Urbaine(s) : les matières à penser d’Anne Nguyen aux Métallos - Critique sortie  Paris Maison des Métallos
Crédit : Patrick Berger Anne Nguyen, breakeuse hyper connectée à la culture hip hop

Publié le 20 décembre 2023 - N° 317

La chorégraphe Anne Nguyen porte un regard aiguisé sur la culture hip hop. Spectacles, rencontres, ateliers, jeu vidéo et fête forment un temps fort aux allures de voyage dans une multitude de pratiques et d’histoires. Une danse à voir, à vivre, et à penser, avec, en filigrane, une conscience sociale et politique des enjeux du hip hop aujourd’hui. À découvrir du 11 au 25 janvier aux Métallos. 

En quoi ce temps fort reflète-t-il votre démarche ?

Anne Nguyen : Ce moment effervescent offre l’opportunité de présenter ma manière de penser, sous plusieurs facettes et dans un parcours long. Mes spectacles se répondent, se font écho dans une logique de continuité. Nous allons pouvoir développer les rencontres, notamment sous la forme de « conversations ». La première aura lieu avec le danseur Pascal Luce, qui connaît bien la culture afro-américaine et l’histoire de la colonisation et de l’esclavage. L’idée est de comprendre comment l’histoire se construit, car le hip hop n’a pas été créé à partir de rien. Il est la continuité d’un héritage profond, américain et afro-américain, et le fruit d’une créolisation. On remarque à la fois une évolution contemporaine avec ce qui se vit – dans le tissu social et dans l’air du temps – mais également une vraie continuité dans le rapport au corps, à la terre, à l’autre, au cercle. Il est comme une résurgence de quelque chose d’ancestral qui a toujours été là et qui se manifeste sous différentes formes et à différentes époques.

« Ce que je veux faire émerger dans ce temps fort, ce sont des formes de socialité, de rencontres. »

Cela relève-t-il d’une forme d’engagement de votre part à remettre de la culture dans une pratique institutionnalisée ?

A.N. : Il s’agit de comprendre les dynamiques qui ont fait naître le hip hop  et dans lesquelles les Afro-Américains ont toujours vécu, depuis l’esclavage et la ségrégation, c’est-à-dire des dynamiques d’exclusion, à partir desquelles les jeunes devaient se réinventer contre la culture dominante. Aujourd’hui, on est dans une phase de gentrification. C’est un problème car on perd le lien à ce qui est important : le lien au social et à ce côté vital. C’est au départ un mouvement de fédération de la jeunesse, alors allons-y, retournons au terrain. Pour moi, à partir du moment où une culture n’a pas de socialité, pas de dimension intergénérationnelle, on ne peut plus parler vraiment de culture. Dans la deuxième « conversation », qui clôt une journée entière de danse et de battle avec trois classes de collèges, nous parlerons avec le penseur Pacôme Thiellement du rôle de la culture dans la société. Je pense qu’il y a un spectre de possibilités pour la culture d’exister, entre multiculturalisme et cosmopolitisme. Le hip hop cosmopolite par essence se crée dans des dynamiques d’échanges et d’influences culturelles. On le voit avec le voguing, le waacking, le krump, la danse afro…

La danse afro sera très présente à travers Hip hop Nakupenda, Matière(s) Première(s), et la question de la sape…

Crédit : Patrick Berger
Matière(s) Première(s), dans l’univers des cultures africaines urbaines

A.N. : Tout comme Underdogs remonte dans le temps des années 60-70, Hip Hop Nakupenda et Matière(s) Première(s) explicitent les liens et cette circulation Afrique – États-Unis – France. C’était important de terminer ce temps fort par une fête en lien avec Matière(s) première(s), de s’éclater, de donner l’occasion aux gens de se « saper comme jamais », d’autant que la sape a une histoire fascinante en lien avec la colonisation. Ce que je veux faire émerger dans ce temps fort, ce sont des formes de socialité, de rencontres, c’est éveiller la curiosité et explorer en lien avec le public.

 

Entretien réalisé par Nathalie Yokel

A propos de l'événement

du jeudi 11 janvier 2024 au jeudi 25 janvier 2024
Maison des Métallos
94 rue Jean-Pierre Timbaud, 75011 Paris.

Au programme :

Underdogs, les 11 et 12 janvier à 20h.

Hip hop Nakupenda, le 13 janvier à 18h.

Matière(s) Première(s) + solo de Joseph Nama, les 24 et 25 janvier à 20h.

Rencontre « Cultures triangulaires : continuités et discontinuités culturelles », le 20 janvier à 18h.

Rencontre « La culture, un lien vital : hip hop et cosmopolitisme », le 23 janvier à 19h.

 

 

Et aussi :

Skillz, un jeu interactif à la découverte de la diversité des danses urbaines : du 11 au 25 janvier.

Ateliers danse afro : en famille le 13 janvier à 15h et niveau intermédiaire-avancé le 20 janvier à 15h30.

Lecture / arpentage « Fly Girls : Histoire(s) du hip hop féminin en France » : le 17 janvier à 18h30.

Fête « Sape-toi comme jamais ! » : le 25 janvier à 21h30.

 

Tél. : 01 47 00 25 20.

maisonsdesmetallos.paris

 

 

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