Le théâtre de Carolyn Occelli : une maison dédiée aux spectateurs et aux artistes

Qu’est-ce qui vous a décidée à organiser la saison 2023/2024 du Théâtre de Suresnes Jean Vilar autour de diptyques de spectacles ?

Carolyn Occelli : Cette décision est le reflet de l’accompagnement des artistes que met en place notre théâtre, qui n’est pas uniquement un lieu de représentation des spectacles, mais aussi un lieu de production et de résidence. C’est aussi une façon d’accompagner les publics. Car finalement accueillir des artistes deux fois dans une même saison, c’est proposer des parcours aux spectateurs, c’est créer des résonnances au sein d’une programmation très ample, composée de spectacles appartenant à toutes sortes de disciplines.

C’est aussi une manière de favoriser la constitution de répertoires pour les artistes…

C.O. : Absolument. J’accorde une attention particulière à la création, mais il me semble également très important de faire vivre les spectacles dans la durée, pour éviter de voir se développer une dynamique consumériste de propositions qui en chassent d’autres, qui elles-mêmes en chassent d’autres… Je trouve essentiel de donner à voir des spectacles qui ont été créés lors des saisons passées, afin d’en prolonger l’existence, de défendre l’idée d’une approche durable des arts vivants. Programmer deux spectacles d’un même artiste ou d’une même compagnie, c’est en effet donner à voir un répertoire. Et puis, cela permet de pouvoir imaginer des actions culturelles avec ces créatrices ou créateurs, actions parfois en direction de publics spécifiques, parfois en direction de tous les publics.

« Bien sûr, je souhaite que les publics sortent plus heureux de nos salles, mais sans se déconnecter du monde. »

Il s’agit donc, aussi, d’inventer des liens avec les territoires…

C.O. : C’est ça. Le fait de proposer deux rendez-vous avec le même artiste — metteur ou metteuse en scène, chorégraphe, dramaturge… — crée une forme de proximité qui permet d’effectuer un travail de territoire plus approfondi. Cette mise en avant de diptyques favorise la possibilité, pour les artistes, de s’emparer de notre théâtre comme d’une maison qui est la leur, car ils savent qu’ils vont y revenir. Elle rend également possible une rencontre plus ample avec les publics, dans un temps moins limité.

À travers vos choix de programmation, quel élan souhaitez-vous impulser au Théâtre de Suresnes ?

C.O. : J’ai vraiment envie que notre théâtre soit une maison pour les spectateurs et pour les artistes, dans l’idée d’hospitalité, de partage, avec une exigence artistique et poétique qui questionne nos problématiques contemporaines. Bien sûr, je souhaite que les publics sortent plus heureux de nos salles, mais sans se déconnecter du monde, en étant en prise directe avec ce qui se passe aujourd’hui autour de nous. Les diptyques qui composent cette saison sont révélateurs d’une histoire au long cours que j’ai envie d’écrire, ainsi que des liens généreux et singuliers que je veux tisser entre les artistes, les spectateurs et notre théâtre.

Ce qui passe, notamment, par un programme d’actions culturelles…

C.O. : Nous organisons des ateliers, des rencontres, nous ouvrons des répétitions aux publics… Pour engendrer des liens plus forts entre spectateurs et artistes, il est important de donner à voir le travail en train de se faire, afin de le rendre plus concret et, je l’espère, moins impressionnant. Notre objectif est vraiment de mettre en œuvre tous les leviers possible pour toucher des personnes qui, sans ces actions, ne se seraient peut-être jamais imaginées spectatrices et spectateurs de théâtre.

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat