ANDRÉ ENGEL
LE POUVOIR DE L’INVISIBLE ENTRE VEILLE [...]
AVEC LE BOURGEOIS, LA MORT ET LE COMÉDIEN, LA JOYEUSE BANDE DE LA NUIT SURPRISE PAR LE JOUR S’EMPARE DE LA LANGUE DE MOLIÈRE ET LUI REDONNE TOUT SON MORDANT JUBILATOIRE.
« C’est une histoire de troupe, au double sens du terme… Les comédiens de La Nuit surprise par le Jour viennent pour la plupart de l’école de Chaillot, du temps de Vitez. Nous avons fondé la compagnie avec le désir de tenter des aventures hors normes, utopiques. L’idée de la trilogie s’inscrit dans cette visée. Mais elle est née de mon expérience de travail avec Gabily, qui écrivait pour nous au fil du plateau, en se nourrissant de nos histoires, de nos discussions. Comédien, auteur dramatique, metteur en scène et chef de troupe, Molière taillait les rôles pour ses acteurs. D’où l’envie de chercher dans son oeuvre les traces des liens qu’il entretenait avec eux. Je me suis plongé dans les textes, j’ai recherché les distributions originales, afin de capter dans les évolutions de l’écriture un écho à la vie de la compagnie.
RACONTER MOLIÈRE ET SE RACONTER
Les Précieuses ridicules, farce issue du théâtre de tréteaux, Tartuffe, pièce plus classique, en alexandrins, plus politique aussi et très controversée, et Le Malade imaginaire, comédieballet, rêve de spectacle total, marquent trois moments dans le parcours de Molière et révèlent une transformation dans le rapport au public, au pouvoir, à la troupe. Elles tracent un cheminement de création, tout en racontant l’histoire d’une équipe en train de se constituer, de se confronter au sens du geste artistique. Ces trois pièces évoquent également le thème de l’identité, du masque, sujet formidable pour nous qui aimons jouer avec le travestissement et les artifices. Si le divertissement triomphe, la peur de la mort rôde pourtant derrière le rire, comme toujours chez Molière. Le théâtre est sans doute un des endroits où nous pouvons parler de cette angoisse. Le rôle du comédien et de la comédie consiste peut-être à rappeler que tout cela n’est qu’un jeu. »
Propos recueillis par Gwénola David
Le Bourgeois, la Mort et le Comédien (Les Précieuses ridicules, Tartuffe, Le Malade imaginaire, de Molière) ; mise en scène d’Éric Louis.
Du 9 au 27 octobre 2007. Théâtre de l’Odéon.