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Spectacles de 40 à 50 minutes, pouvant être [...]
Focus -215-Théâtre de la Ville
Malicieux bricoleur, Pierre Meunier explore la matière pour en desceller l’étrange puissance et construit ses créations aux lisières du théâtre. Dans Molin-Molette, il ouvre son univers aux enfants.
« J’avais envie de faire découvrir aux enfants la malice et le plaisir des mots. »
Comment est né ce spectacle ?
Pierre Meunier : Il s’inscrit dans un chantier sur la force poétique du langage que j’ai ouvert en 2012 avec Du fond des gorges. J’avais envie de partager cette jubilation, de faire découvrir aux enfants la malice et le plaisir des mots, considérés et éprouvés comme une matière indocile, rebelle, joueuse et surprenante, toujours tentée de s’affranchir de la tutelle du raisonnable et du sensé. Une matière que les enfants doivent apprendre à maîtriser. Il s’agit de faciliter l’accès aux jeux avec le langage mais aussi le silence. J’ai invité le ressort, avec lequel je me débats depuis plusieurs années, comme image du langage : tout aussi imprévisible, parfois tonitruant ou bien assoupi, il cherche sans cesse à s’échapper de la pesanteur et suit son propre mouvement. C’est un formidable combustible pour l’imaginaire.
Cette matière brute de fer rouillé tranche avec l’esthétique lisse de la vidéo et des images virtuelles qui façonne de plus en plus l’univers des enfants…
P. M. : Elle recèle une richesse d’imaginaire salutaire, car elle ouvre des possibles, avant que la manufacture et le marketing ne l’enferment dans des objets formatés pour les consommateurs. Contrairement aux reproductions vidées de toute substance qui s’affichent sur des écrans, elle tend un lien poétique entre le monde tangible, sensible, et l’imagination qui peut la transformer à sa fantaisie. Son étrangeté, son indiscipline et son pouvoir de rêverie sont essentiels.
Qui sont Molin et Molette, les deux personnages ?
P. M. : Deux clowns chercheurs qui élèvent des ressorts et fabriquent du silence. Ils sont fascinés par ce drôle d’élevage, qui les surprend par ses développements insoupçonnés. Ils essaient de le dompter, tout comme la parole, et mènent différentes expériences dans leur atelier. Molin se heurte souvent aux mots et aux ressorts, qui restent coincés, se mélangent et s’amusent entre eux. Molette est plus à l’aise avec ces matières, elle s’applique à les dresser mais parfois se fait mordre ! De telles expériences exigent une vigilance de tous les instants car elles ne sont pas sans danger…
Entretien réalisé par Gwénola David