Voyage musical au pays du conte
Les cinq musiciens des Percussions Claviers [...]
Focus -218-Théâtre National de Toulouse Midi~Pyrénées
Compositeur, pianiste, improvisateur, pédagogue et homme de télévision, Jean-François Zygel voue aussi une véritable passion à la forme du ciné-concert, espace d’expression musicale où « tout est possible ! ». Au programme quatre ciné-concerts sur des chefs-d’œuvre du cinéma muet fantastique et une conférence au piano.
Un film muet appartenant au patrimoine cinématographique ne pourrait-il pas être vu sans musique, en se suffisant à lui-même en quelque sorte ?
Jean-François Zygel : Projeter un film muet sans musique n’a pour moi pas beaucoup de sens. Tout d’abord, historiquement, les films muets ont toujours été accompagnés de musique (piano, orgue, trio, petit ensemble instrumental ou grand orchestre, selon les moyens et la taille de la salle). Et ce qu’il y a de merveilleux dans le ciné-concert, c’est justement cette alliance à part égale de la musique et de l’image. Ce n’est pas par hasard si tant de compositeurs (Ravel, Honegger, Darius Milhaud, Florent Schmitt, etc.) pensaient à l’époque que le cinéma muet avec musique allait petit à petit remplacer l’opéra au cours du XXe siècle…
Quelle motivation particulière apporte la composition pour l’image au musicien que vous êtes ?
J.-F. Z. : Je suis amoureux du cinéma muet depuis l’âge de 25 ans. J’ai découvert cet extraordinaire patrimoine grâce à Christian Belaygue, qui m’avait commandé une musique pour Nana de Jean Renoir à l’auditorium du musée du Louvre. J’ai depuis composé une dizaine de musiques pour des films muets, la toute dernière il y a quelques mois pour La Belle Nivernaise de Jean Epstein et l’orchestre de l’Opéra de Rouen. Composer pour le cinéma muet est une aventure particulière : il faut parfois écrire jusqu’à deux heures et demie de musique ! C’est un travail solitaire, une collaboration avec un réalisateur qui n’est plus là, dont on essaye de soutenir, préciser et compléter les intentions.
Selon quels critères avez-vous choisi les films ?
J.-F. Z. : Qu’il s’agisse de composition ou d’improvisation, je me sens particulièrement inspiré par les grands cinéastes allemands (Fritz Lang, Murnau, Robert Wiene, etc.). J’ai aussi une grande affection pour les films surréalistes ou expérimentaux (René Clair, Buñuel, Germaine Dulac, Fernand Léger, etc.). Un film parlant est une œuvre close, mais les films muets sont offerts à l’interprétation musicale, comme Mozart et Chopin pouvant toujours être renouvelés par une nouvelle vision d’interprète.
A Toulouse, parallèlement à ces quatre ciné-concerts, vous allez animer une conférence au piano. Quel en est le programme ?
J.-F. Z. : Grâce à quelques extraits choisis et projetés sur grand écran, j’essaierai de montrer comment plusieurs accompagnements musicaux peuvent changer radicalement la lecture d’un film, son rythme interne, son découpage. Il existe de nombreuses manières d’envisager cet art : dialogue avec l’image, décor sonore, moteur d’entraînement, théâtralisation, musique d’ambiance, incarnation psychologique… Ce que j’adore dans cet art, c’est qu’il n’est pas figé : chaque nouveau ciné-concert permet de reconsidérer l’alliance de l’image et de la musique. Comme toujours quand on compose, l’imagination et l’inspiration dictent leurs lois. Il ne faut cependant pas oublier une règle d’or : nous sommes au service de ces génies de l’image. Il faut que les spectateurs sortent de la séance en se disant « Quel beau film ! » et non pas « Quelle belle musique ! ».
Propos recueillis par Jean-Luc Caradec
Les Mains d’Orlac de Robert Wiene le 7 avril à 20h. Le Fantôme de l’Opéra de Rupert Julian le 14 avril à 20h. Le Cabinet du docteur Caligari de Robert Wiene le 26 mai à 20h. La Chute de la maison Usher de Jean Epstein le 2 juin à 20h. Conférence au piano Cinéma et Musique le 14 avril à 14h30.
Tél : 05 34 45 05 05. Site : www.tnt-cite.com
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