La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -161-bethune

Corine Miret

Corine Miret - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 octobre 2008

Carnet de voyage

La Revue Eclair fonde son travail sur des expériences utilisées comme matériau pour des représentations théâtrales. Après sept semaines passées dans un village de l’Artois, Corine Miret a coécrit un spectacle qui met en perspective les sensations liées à ce séjour.

Quel a été le point de départ de ce voyage dans l’Artois ?
Corine Miret : L’idée initiale était d’inventer un spectacle en lien avec le territoire de la Comédie de Béthune. A l’issue d’un premier séjour dans l’Artois, Stéphane Olry et moi nous sommes dit qu’une femme seule qui arriverait pour passer plusieurs semaines dans un village, en plein hiver et sans raison précise, susciterait beaucoup d’interrogations. Cela nous a semblé une manière intéressante d’interroger les notions de frontière, d’étranger, d’altérité… Je me suis donc installée, durant sept semaines, dans un gîte en me mettant en situation de rencontrer des gens, d’être disponible pour les rapports sociaux. L’idée était de vivre chaque semaine par rapport à l’un des cinq sens, la sixième semaine étant consacrée à l’intuition et la dernière à tous les sens confondus.
 
Vous êtes-vous fabriqué un personnage pour cette expérience ?
C. M. : Non. Ce séjour étant profondément lié à l’intériorité, à la vie privée, il fallait donc que je sois au plus près de la vérité. Je donnais donc ma véritable identité aux personnes que je rencontrais, mais je restais évasive quant aux raisons de ma présence, prétextant que j’étais là pour réfléchir, en vue d’un nouveau spectacle.
 
« Les frontières, c’est vraiment nous qui nous les créons. »
 
Pensiez-vous à la représentation à élaborer, durant ces sept semaines ?
C. M. : Pas du tout. Si on présuppose du résultat, ce n’est pas la peine de vivre l’expérience. Notre travail est d’aller où les choses nous mènent, de se mettre en état de disponibilité, de se livrer à l’inconnu.
 
Quel nouveau rapport au monde ce séjour vous a-t-il permis d’explorer ?
C. M. : Lorsque, tout à coup, on se retrouve dans un endroit où l’on n’a aucune raison d’être, c’est comme si on faisait un pas en dehors de la réalité, comme si on franchissait la ligne du côté des rêves. Sans passé, sans futur, je n’avais qu’à vivre le présent. Ainsi détaché du quotidien, on est pleinement disponible et les rencontres sont souvent, elles aussi, exceptionnelles, en dehors du quotidien. J’ai vécu une aventure humaine extraordinaire.
 
Ce voyage a-t-il été l’occasion de certaines prises de conscience ?
C. M. : Ce qui est très troublant, c’est que ce genre de situations vous amène à vous demander à quoi vous êtes vraiment attaché dans votre vie. On peut très vite se mettre à gamberger : l’idée de rupture devient soudainement possible. Finalement, on s’aperçoit que les frontières, c’est vraiment nous qui nous les créons, que l’on peut aller on l’on veut, qu’il suffit d’oser.
 
Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat


Un Voyage d’hiver, de Corine Miret et Stéphane Olry ; mise en scène Stéphane Olry. Du 15 au 18 décembre 2008.

A propos de l'événement



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