Baudelaire, prince des huées, rencontre avec Clément Althaus

« Je cherche avant tout à rendre le caractère imprévisible de ce poète qui cultivait l’art de déplaire. C’était un dandy provocateur. Il faut l’imaginer se promenant dans les rues de Paris, les cheveux verts et Jeanne Duval à ses bras, métisse, prostituée, plus grande que lui d’au moins vingt centimètres, qu’il emmène manger à La Tour d’Argent. Beaucoup d’anecdotes relatent son goût pour l’originalité, le scandale et la part sombre du personnage, qui a longtemps lutté contre la syphilis, qui le fera mourir, et le recours aux drogues, dont il décrivait pourtant l’inanité.

Aller à l’endroit de la laideur

On se retrouve dans un de ses rêves, un lieu indéfini, une sorte de galerie d’art, où Baudelaire est amené à rencontrer un monstre vivant, projection de lui-même. Nous sommes deux au plateau. Un guitariste qui utilise des boucles, des loopers, permettant de superposer les couches musicales, et moi, à la guitare et au piano, dans un esprit rock qui colle bien à l’esprit adolescent de Baudelaire, avec grincements, distorsions et références suffisamment accessibles pour faire de la musique un vecteur émotionnel, souvent dans une adresse frontale, déjà présente chez Baudelaire. Nous alternons entre l’onirisme de la narration et celui de ses poèmes, en tentant de voir la vie à travers ses yeux : aller à l’endroit de la laideur pour montrer à quel point le poète sait la transcender. »

Propos recueillis par Eric Demey