La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -310-En direct avec les artistes Génération Spedidam

Baptiste Herbin, saxophoniste tout feu tout flamme

Baptiste Herbin, saxophoniste tout feu tout flamme - Critique sortie  Paris

Publié le 14 avril 2023 - N° 310

Le saxophoniste alto Baptiste Herbin est l’une des fines lames du jazz en France, animé par une fougue communicative et une énergie inépuisable dès qu’il embouche l’instrument.

Il est connu dans le tout-Paris du jazz comme un de ces saxophonistes prompts à dégainer son sax quand une bonne occasion se présente, et à aimer ferrailler avec ses confrères dans les bœufs jusqu’à l’épuisement des forces en présence. Tout feu tout flamme, Baptiste Herbin est, en effet, un grand amoureux du saxophone, de l’alto en particulier, et ce depuis l’enfance. Élevé dans une famille mélomane — son frère Bastien est l’un des accordeurs experts qui fournit les plus grandes salles en pianos — il a débuté le saxophone à l’âge de 11 ans. Cette passion a fait de lui un praticien virtuose de l’instrument, capable d’enchainer les traits fulgurants et les phrases ciselées avec une précision qui laisse pantois. Pas étonnant que le célèbre facteur d’instruments Selmer l’ait choisi pour élaborer et tester ses nouveaux modèles de saxophone : Herbin connait tous les secrets de sa mécanique et prend un plaisir sourcilleux à conseiller la marque.

Fougue et panache

Dernièrement, il a d’ailleurs défrayé la chronique du petit monde du jazz français en rapportant comment il avait enfin réussi à remettre la main sur son instrument vintage chéri, qui lui avait été dérobé il y quelques années en plein Paris. Originaire de Chartres, Herbin est un temps passé par le conservatoire de Paris mais c’est dans les clubs de jazz de la capitale qu’il a surtout fait son éducation et trouvé ses premiers mentors, en particulier deux batteurs « historiques » de l’Hexagone bluffés par sa fougue juvénile : André Ceccarelli, qui l’accompagnait sur Brother Stoon, son tout premier album paru en 2012, et Aldo Romano, qui l’avait choisi pour son quartet New Blood au même moment. Pétrie de la grande tradition de l’alto moderne, de Charlie Parker à Lee Konitz en passant par « Cannonball » Adderley à qui il a dédié une composition, son assurance sur le sax lui a valu de gagner le respect de figures américaines du jazz telles que le pianiste Donald Brown, le batteur Ali Jackson (présent sur son troisième disque, Dreams and Connections, paru en 2018) ou son confrère Jon Gordon avec qui il partage la scène au mois de mai à Paris autour de la musique de Thelonious Monk.

Le goût de voyages illimités

Ancré dans le be-bop, qu’il revendique comme sa musique de cœur, Herbin embrasse cependant des horizons musicaux plus larges. Des affinités personnelles l’ont conduit à Madagascar où il est tombé sous le charme de l’Afindrafindrao, une tradition musicale locale au point d’adopter la valiha, un instrument à cordes typiquement insulaire, dont il a appris à jouer avec une aisance déconcertante. Ces dernières années, c’est plutôt du côté du Brésil que son cœur a balancé. Plusieurs séjours sur place l’ont acclimaté aux rythmes du choro, du foro ou de la samba, qu’il a choisis de placer au cœur de son quatrième album, Vista Chinesa (2020), enregistré sur place avec, au piano, une légende underground du jazz brésilien, Ed Motta. Récipiendaire en 2019 du prix Django-Reinhardt de l’Académie du jazz, Baptiste Herbin possède désormais une réputation parfaitement établie : celle d’un musicien plein de fougue et de panache, doté d’une sonorité d’une grande richesse. Membre régulier du quartet du contrebassiste Pierre Marcus et de l’octet de la pianiste Leila Olivesi, le saxophoniste se retrouve aussi au cœur du projet « Herbin Plays Herbie » dans lequel il interprète les classiques de Hancock, toutes périodes confondues, en version grand orchestre, sur des arrangements brillants de Christophe Violland. Paru en mars de cette année, son dernier album en date le voit faire la paire avec le trompettiste toulousain Nicolas Gardel. Un tandem haut en couleurs, énergique et dopé aux beats urbains, qui prend le nom de Symmetric. Porté par les synthés et l’orgue débridés de Laurent Coulondre et les frappes de Yoann Serra, ce quartet de choc joue la carte d’un jazz-rock résolument électrique dans lequel le côté funky de l’altiste — parfois branché sur effets — ressort particulièrement. Preuve s’il en fallait qu’au sujet de Baptiste Herbin, nous ne sommes pas au bout de nos surprises.

Vincent Bessières

A propos de l'événement

Baptiste Herbin
du jeudi 25 mai 2023 au jeudi 25 mai 2023


Dernier album paru : Baptiste Herbin et Nicolas Gardel, Symmetric (Matrisse Productions).

Studio de l’Ermitage, 8 rue de l’Ermitage, 75020 Paris. Concert le jeudi 25 mai à 20h30. Tél : 01 44 62 02 86.

A lire aussi sur La Terrasse

x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur le spectacle vivant

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur le spectacle vivant