Aline Piboule, le piano aux affinités électives

Pour Aline Piboule, « le récital est une sorte de voyage » qui, en tissant des affinités entre les œuvres, éclaire le répertoire d’une manière inattendue. Le programme Rivages et héritages, qu’elle a préparé pour le Festival de Radio-France à Montpellier, renouvelle l’approche du Tombeau de Couperin de Ravel par le voisinage de la Pastoral Suite de Cyril Scott, contemporain britannique du compositeur français. L’adaptation du florilège au gré des scènes contribue à varier les échos entre les œuvres : le triptyque marin Sillages de Louis Aubert, écrit en 1913, esquissera une perspective différente, à Piano aux Jacobins, que celle suggérée par l’association, à Piano en Valois, avec le Prélude, choral et fugue de Franck. Ce sens de la narration, la soliste le met également au service de l’initiation du jeune public, à l’exemple de la Pochette musicale à l’Orangerie de Bagatelle autour de la figure d’Ulysse, avec des pièces de Schubert, Debussy et Bartók.

Ruines, une création à quatre mains

C’est avec Pascal Quignard qu’Aline Piboule approfondit ce désir de raconter une histoire avec la musique. Après Boutès ou le désir de se jeter à l’eau, repris à Strasbourg en septembre, le duo présente dans les ruines de l’abbaye de Jumièges leur deuxième création à quatre mains, Ruines, sur des textes inédits que l’écrivain a conçus pour cette nouvelle lecture-récital, sur des pages de Liszt, Debussy, Schubert, Brahms, Greif, Mompou, Adès et Schumann. Si la thématique résonne avec le conflit en Ukraine, elle parle de manière intime à Pascal Quignard, qui a grandi au Havre, ville rasée par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale. Les deux complices forment « comme un duo de musique de chambre » avec lequel Aline Piboule « éprouve un grand bonheur à partager la scène, tout en étant dans une entière liberté ».

Gilles Charlassier