Julia Vidit reprend sa mise en scène du « Menteur » de Corneille, une version contemporaine qui swingue
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Première femme à diriger la troupe de la Comédie-Française de 2006 à 2014, à la tête du Théâtre National de Nice depuis fin 2019, Muriel Mayette-Holtz et les siens font vivre un théâtre en prise directe avec la vie. En décembre, la comédienne et metteuse en scène crée le festif Clair et La Fontaine, avec les apprentis-comédiens de l’ERACM. Aux Franciscains, à La Cuisine et dans les Arènes de Cimiez, l’art vivant révèle ses effets et ses bienfaits.
Comment dans notre actualité envisagez-vous la place de la culture, du théâtre ?
Muriel Mayette-Holtz : La culture, et singulièrement le théâtre, viennent nous compléter, nous perturber, ouvrant ce que j’appelle des chemins de traverse auxquels on ne s‘attend pas. Une œuvre d’art n’existe pas si elle n’est pas reçue par quelqu’un d’autre. La culture est fondamentale, non pas dans le sens d’un empilement des connaissances, mais par la création d’une pensée émotionnelle qui nous apprend que le monde est plus vaste que soi. Découvrir le regard des autres sur le monde et sur l’humain permet de ne pas être en boucle sur soi-même. On me dit souvent : « c’est formidable ce que tu fais, mais je n’ai pas le temps ». Or le temps consacré à la culture, c’est un temps que tu t’accordes à toi-même. Ce n’est pas quantifiable, il est difficile d’expliquer à quel endroit ça agit, mais on peut pourtant affirmer que le théâtre opère comme un voyage immobile, dans le secret du cœur, dans la densité du verbe, dans la multiplicité des possibles. En juin dernier, nous avons lancé la première édition de notre Festival de tragédies, j’étais inquiète, me disant que l’époque poussait plutôt à se distraire, mais ce fut une réussite au-delà de nos espérances.
En quoi ce festival correspond-il à l’identité artistique du Théâtre national de Nice ?
M.M.-H. : La mise en lumière des grands textes, puisant leurs racines dans l’histoire depuis l’origine, est l’un des axes directeurs de notre projet. Il est important que dans la cinquième ville de France un accès aux grands textes soit garanti. J’ai grandi à la Comédie-Française avec comme ancrage cette idée d’un répertoire qui au fil du temps s’enrichit de nouvelles œuvres et écritures. Le succès du Festival de Tragédies dans les sublimes Arènes de Cimiez a illustré cette nécessité d’un rendez-vous avec les poètes, avec la pensée, avec l’émotion. Entendre ces textes fait vibrer en nous une résonance puissante, intime, loin de notre superficialité quotidienne. Parmi les classiques sont programmés au cours de la saison Marie Stuart de Maryse Estier, qui a en juin dernier présenté à la Comédie-Française La dernière Nuit de Don Juan d’après Edmond Rostand, Dom Juan mis en scène par Macha Makeïeff, Les Fausses Confidences par Alain Françon, Le Rouge et le Noir sous le regard de Catherine Marnas, etc.
Quels sont les autres axes directeurs de cette saison 2024-2025 ?
M.M.-H. : Le second fil conducteur est la multiplicité des solfèges, c’est-à-dire la conjugaison de toutes les disciplines du spectacle vivant, avec un certain nombre de spectacles inclassables tel Chroniques de Gabriella Carrizo de la compagnie Peeping Tom, que nous produisons. Se nourrir de la voix visionnaire des artistes, des auteurs classiques ou contemporains, des nouvelles écritures, est profondément inspirant. Au printemps, nous proposons la troisième édition d’un Festival de Magie qui rassemble les générations, un rendez-vous rare en France. Mon grand-père magicien dirigea la première boutique de magie à Paris, j’ai ainsi grandi dans l’admiration de cette discipline très exigeante. Quand le théâtre s’en empare, c’est merveilleux. De septembre à juin, je tiens aussi à souligner que de nombreuses jeunes femmes talentueuses sont à l’affiche, dont Maryse Estier, Raphaëlle Boitel, Julia Vidit, Johanna Nizard, Linda Blanchet, Élise Vigneron, Jeanne Candel, Noémie Ksicova, Agnès Régolo, Tamara Al Saadi… Les femmes ont enfin les moyens de faire ce qu’elles veulent et elles le font admirablement bien.
Quel est le spectacle que vous présentez en fin d’année ?
M.M.-H. : J’écris Clair et La Fontaine avec et pour les apprentis-comédiens de l’ERACM (École Régionale d’Acteurs de Cannes et Marseille) afin de parfaire leur formation, avec comme matière les Fables de La Fontaine. Je me souviens des prodigieuses Fables qu’avait imaginées Bob Wilson à la Comédie-Française en 2008. Très drôles et souvent cruelles, les Fables constituent un formidable terrain de jeu où les animaux de théâtre épinglent nos travers avec un humour qui fait mouche. Les dire dans une écriture de plateau contemporaine est un exercice très exigeant. Festif, intergénérationnel, le spectacle rejoint par des comédiens de la troupe du Théâtre exalte le plaisir du rire. Notre programmation, ainsi que nos nombreux ateliers et moments de rencontre, nous élèvent et nous unissent comme célébration du vivant.
Propos recueillis par Agnès Santi
À partir de 8 ans.
Tél : 04 93 13 19 00.
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