La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -280-La 45ème saison des Concerts du Dimanche Matin

A l’écoute attentive des artistes et du public

A l’écoute attentive des artistes et du public - Critique sortie Classique / Opéra Paris Théâtre des Champs-Élysées
© Michel Franck

Entretien Jeanine Roze, directrice des Concerts du Dimanche Matin

Publié le 26 septembre 2019 - N° 280

La fondatrice et directrice des Concerts du Dimanche Matin revient sur son parcours.

Votre histoire professionnelle commence dans un autre univers que celui de la musique classique, avec deux amours : la chanson et le théâtre… Comment s’est fait ce passage ? 

Jeanine Roze :  En avril 1968 je quitte la chanteuse Barbara dont je suis la secrétaire et m’engage joyeusement dans Mai 68. En septembre, sans travail, grâce à la recommandation d’un ami, je suis engagée sans poste précis par la grande maison de disques Barclay, et là, d’un service à l’autre je remplace les absents. Un jour, j’arrive au département classique où je travaille avec Patrice Fontanarosa et Bruno Rigutto et ce sont eux qui me conseillent de monter ma propre agence artistique classique. Ils sont suffisamment convaincants, car quoique n’étant pas du tout musicienne je les écoute. Magie et pouvoir des rencontres !

D’où d’abord ce regard presque extérieur porté sur le monde de la musique classique…

Jeanine Roze : Oui, un univers à découvrir, bien loin du fonctionnement du milieu subventionné, auquel je suis toujours étrangère, étant restée la saltimbanque qui compte ses fauteuils, avec un seul objectif : « l’artiste sur scène et du public dans la salle ».

Ce modèle économique privé, très contraint, ne vous a pas empêchée d’innover. On peut par exemple considérer que le mouvement baroque a commencé à Paris chez vous avec les Christie, Bruggen, Kuijken, Hogwood et Malgoire…

Jeanine Roze : Pour leurs concerts en salles oui.  Avant ils jouaient uniquement dans les églises… Je n’ai pas réalisé que ces musiciens étaient en train de révolutionner le monde musical, je suis allée vers eux parce qu’ils me plaisaient, j’aimais leur musique, leur mode de fonctionnement et surtout ils m’ont acceptée sans poser de questions.

Il y a un homme de théâtre au commencement des Concerts du Dimanche Matin : Jean-Louis Barrault.

Jeanine Roze : En 1975, n’arrivant pas à faire engager mes artistes, j’ai décidé de monter ma propre série de concerts et ai cherché une salle ayant déjà l’idée des dimanches matin, peut-être en souvenirs de mon adolescence au TNP… Jean-Louis Barrault avait installé son chapiteau dans la Gare d’Orsay, immense vaisseau totalement vide coiffé d’une immense verrière, où l’on croisait Samuel Beckett, Nathalie Sarraute, Marguerite Duras et j’ai pensé « C’est là qu’il faut que j’aille ». Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud me reçoivent et je me présente : « Je suis agent artistique, je représente de jeunes artistes que personne ne veut engager, je voudrais faire huit concerts avec eux, une heure de musique classique, sans entracte, gratuits pour les moins de neuf ans, avec placement libre et sans réservation ». Madeleine Renaud refuse énergiquement et Jean-Louis me regarde et dit : « Je te donne mon théâtre si cela ne me coûte rien ». Cela a commencé comme ça ! Grâce à Louis Dandrel alors directeur de France Musique qui a décidé de les retransmettre en direct, les huit concerts se sont transformés en saisons…

« Je n’ai eu de cesse de travailler afin de provoquer cette rencontre entre artistes et public. »

De quoi êtes-vous la plus fière ?

Jeanine Roze : D’avoir instinctivement su choisir de jeunes artistes et de les avoir accompagnés jusqu’à ce qu’ils trouvent leur public.

Vous avez un rapport viscéral au public…

Jeanine Roze : Oui, j’ai besoin d’être parmi le public, de le sentir réagir ou pas. Il peut même parfois m’inspirer dans ma programmation.  Alors qu’elle était encore inconnue Barbara m’avait dit : « Un jour je serai prête, le public le sera également, mais le serons-nous ensemble ? » Je n’ai eu de cesse de travailler afin de provoquer cette rencontre entre artistes et public, et pour cela il faut bien connaître les artistes et surtout les aimer.

Comment voyez-vous l’avenir des Concerts du Dimanche Matin ?

Jeanine Roze : Actuellement je programme 2022, en espérant que le jour où je m’arrêterai quelqu’un aura envie de continuer. Mais pour l’instant je n’ai pas trouvé…

 

Propos recueillis par Jean Lukas

A propos de l'événement

La 45ème saison des Concerts du Dimanche Matin
du dimanche 6 octobre 2019 au dimanche 26 avril 2020
Théâtre des Champs-Élysées
15 avenue Montaigne 75008 Paris.

Les dimanches à 11h.

Tél. 01 49 52 50 50.

Places : 30 €, 20 € (tarif abonnement),

15 € (scolaires, étudiants et moins de 26 ans),

gratuit pour les moins de 9 ans.

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