“Poussière” par Sophie Mayeux : le théâtre de matière et de marionnette comme outil pour évoquer la vie après une catastrophe, avec délicatesse et poésie
Avec Poussière, Sophie Mayeux (cie Infra) [...]
Alliant théâtre et musique, Garance Guierre et Leonor Stirman créent un spectacle intelligent, maîtrisé, ludique, autour du mouvement ouvrier à Malakoff depuis la Commune en 1871. Servie par un quintette de comédiens talentueux, la pièce d’une revigorante vitalité célèbre de belle façon la solidarité et l’engagement.
C’est bien connu, c’est parce qu’on connaît le passé qu’on appréhende mieux le présent. Mais, souvent, le passé nous échappe. Ce beau et revigorant spectacle a le mérite de nous faire (re)découvrir l’histoire du mouvement ouvrier et des luttes sociales dans la ville de Malakoff, en banlieue parisienne, au départ quartier de Vanves, devenue commune à la fin du XIXe siècle. Pas question ici de héros ou héroïnes célèbres mais plutôt d’habitants et habitantes méconnus qui ont œuvré pour combattre l’injustice et faire advenir un progrès social. Après s’être longuement documentées, Garance Guierre et Leonor Stirman ont construit une pièce qui traverse des étapes marquantes de la grande Histoire tout en éclairant le parcours de vie de plusieurs figures, qui, toutes, ont remporté des succès et fait vivre au cœur du quotidien les grandes idées de solidarité et d’unité. Garance Guierre (texte et mise en scène) et Leonor Stirman (texte et mise en musique) sont aussi interprètes du spectacle aux côtés de Kim Aubert, Denis Ardant et Benjamin Candotti-Besson.
Prendre soin du corps social
Le formidable quintette articule grande et petites histoires avec une parfaite fluidité et un stimulant sens du rythme, qui allie avec précision le jeu théâtral et les chants. La pièce ne donne aucune leçon, ne montre aucune amertume, mais choisit au contraire la joie et la vitalité, en actant la possibilité des victoires et l’utilité du faire ensemble. Agrémentée de photos projetées, la narration traverse les événements liés à la Commune de Paris (1871), réprimée lors de la Semaine sanglante, au Front Populaire (1936), à la Seconde Guerre mondiale, à la grande grève des mineurs (1963) lors de laquelle les familles de Malakoff accueillirent des enfants des corons pendant les vacances scolaires. Au cours de cette traversée apparaissent par exemple les personnages de Luce Gerber, résistante, agent de liaison du Colonel Fabien, ou d’Augustine Variot, militante communiste élue au conseil municipal de Malakoff en 1925, alors que les femmes n’ont pas encore le droit de vote. De manière récurrente la pièce met en place une émission médiatique et ses fats intervenants. En filigrane s’esquisse aussi un débat entre options réformiste ou révolutionnaire. De bout en bout, la pièce souligne la beauté et la nécessité de l’engagement. Soit une solidarité en actes, coopérative, concrète, œuvrant pour le bien commun. Le spectacle est une réussite qui, aujourd’hui encore, questionne le corps social : ses maladies, mais aussi ses remèdes, au-delà des fausses radicalités et des gloses de médecins charlatans.
Agnès Santi
à 20h45, relâche le mardi. Tél : 04 90 88 27 33. Durée : 1h15.
Avec Poussière, Sophie Mayeux (cie Infra) [...]
Il travaille, au sein de la Compagnie Le Cri [...]
Aux côtés de Fanny Corbasson, Gilles Droulez [...]