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Au T2G, à Gennevilliers, Solène Arbel, Yann Boudaud et Dominique Reymond exaltent l’écriture singulière de Jon Fosse. Mis en scène par Daniel Jeanneteau et Mammar Benranou, les trois interprètes font de Et jamais nous ne serons séparés un moment de grandeur qui échappe à la norme.
La saison théâtrale vient tout jusque de commencer et une proposition s’impose, déjà, comme un rendez-vous indispensable : l’exploration de l’univers de Jon Fosse par les metteurs en scène et scénographes Daniel Jeanneteau et Mammar Benranou. Deuxième pièce écrite, au début des années 1990, par l’auteur norvégien (lauréat du prix Nobel de littérature en 2023), Et jamais nous ne serons séparés (texte traduit en français par Terje Sinding, publié par L’Arche Éditeur) nous plonge dans le quotidien poreux et l’intériorité fracturée d’une femme qui se penche dangereusement au-dessus du précipice de l’existence (Dominique Reymond). Elle dit attendre un homme (Yann Boudaud) dont la présence, intermittente et incertaine, ponctuellement accompagnée d’une jeune femme elle aussi entièrement mystérieuse (Solène Arbel), fait tanguer l’esprit de cette personnalité à la vulnérabilité déchirante. Immédiatement saisis, nous l’écoutons et la regardons vaciller entre joie, doute, imploration, drôlerie, circonspection, gravité… Prodigieuse Dominique Reymond qui, plus rare qu’une interprète émérite, respire ce texte plutôt qu’elle ne l’interprète. Elle fait vivre la littérature de Jon Fosse de façon étonnamment claire, totalement organique, offrant en partage l’expérience insolite de sa beauté occulte, à certains égards menaçante.
La ligne de crête de l’existence
Sur une ligne de crête sinueuse — entre être et non-être, visible et invisible, trivialité et transcendance — la comédienne nourrit l’écriture de Jon Fosse d’une infinité de nuances, d’une multitude de ruptures et de modulations. Elle paraît ici chez elle, trace un chemin irréfutable, le regard saillant et le sourire toujours ambigu, au cœur d’une nécessité impérieuse de dire, d’exprimer les ressassements perpétuels qui la font se mouvoir et se débattre. En contrepoint à cette ligne mélodique hors norme, Yann Boudaud affirme une intensité dramatique à la fois austère et suave. Sa présence pleinement énigmatique offre un magnifique point d’appui à l’ampleur de la pièce, qui bénéficie également des troubles persistants de Solène Arbel. Comment faire avec les béances du réel et les débordements de la conscience ? Quelles réponses apporter aux convulsions de la solitude, aux embrasements de l’amour qui emporte tout sur son passage ? Comment vivre, en somme, comment être soi dans un monde fait pour les autres ? Jon Fosse n’apporte aucune réponse à ces gouffres de l’intime. Daniel Jeanneteau et Mammar Benranou non plus. Leur mise en scène, en tous points remarquable, célèbre l’étrangeté de Et jamais nous ne serons séparés. Elle révèle les pulsations sourdes et profondes d’une œuvre vertigineuse.
Manuel Piolat Soleymat
Les lundis, jeudis et vendredis à 20h, les samedis à 18h, les dimanches à 16h. Durée : 1h30. Tél. : 01 41 32 26 26
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