La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Entretien / Julie Duclos

Entretien / Julie Duclos - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre national de la Colline.
Julie Duclos. Crédit photo : DR

Nos serments / Théâtre national de La Colline / De Guy-Patrick de Sainderichin et Julie Duclos / Mise en scène Julie Duclos

Publié le 17 décembre 2014 - N° 228

Vivre à contre-courant

 

François vit avec Esther, rencontre Oliwia, en tombe amoureux… Variation banale de l’éternel trio ? Sauf qu’ils refusent le schéma vaudevillesque et cherchent un autre modèle amoureux, hasardeux sans doute, dangereux assurément. La metteuse en scène Julie Duclos et ses comparses de la compagnie In-quarto questionnent ici les utopies privées aux prises avec la réalité.

La trame de Nos serments s’inspire du synopsis de La maman et la putain. Comment le film de Jean Eustache a-t-il nourri la création ?

Julie Duclos : J’ai une expérience singulière avec ce film car j’en ai exploré de nombreuses scènes au Conservatoire national d’art dramatique avec Philippe Garrel, professeur de « jeu devant la caméra », qui nous emmenait tourner dehors, dans les lieux de la vie, pour trouver une nouvelle façon de jouer. Cette œuvre est très ancrée dans les années 70, elle m’intéresse surtout par les situations et les comportements qu’elle met en jeu : une façon d’être à contre-courant, de vivre dans les marges, de refuser les normes… L’histoire est pourtant d’une grande banalité : un jeune homme vit avec une femme et en rencontre une autre… Les personnages refusent le schéma traditionnel de l’éternel trio l’homme / la femme / la maîtresse. Ils tentent une autre vision du couple, de vivre cette rencontre dans un rapport pacifique, sans les cris et la jalousie. Comment assumer ce désir de liberté et ces utopies privées dans la pratique ? Nos Serments montre l’humain aux prises avec ses contradictions, observe l’impact qu’un tel mode de vie provoque dans le secret des corps des uns et des autres, dans leur intime caché.

« La recherche de la vérité dans le jeu demande d’ôter la théâtralité qui souvent le plombe. »

Comment avez-vous travaillé à partir du scénario du film ?

J. D. : Nous avons développé des improvisations en partant du scénario, c’est-à-dire en créant progressivement nos personnages et leur histoire, donc en nous éloignant de la partition originale. Nous avons laissé libre cours à nos rêveries autour des scènes, imaginant ce qui aurait pu se passer avant, après, en hors champ… Ces séquences ont été filmées puis retranscrites puis retravaillées et ont fourni la trame de la pièce. Le scénariste Guy-Patrick de Sainderichin a ensuite écrit avec ce matériau très composite. 

Vous cherchez à inventer de nouveaux processus pour que l’acteur se mette en jeu autrement et touche à une présence réelle. Quels sont-ils ici ?

J. D. : Philippe Garrel nous disait « Il faut mélanger les dialogues aux pensées de la vie réelle. C’est comme ça qu’on obtient de la présence. » Son approche m’a beaucoup marquée, de même que mon expérience comme assistante du maître polonais Krystian Lupa. La recherche de la vérité dans le jeu demande d’ôter la théâtralité qui souvent le plombe. Nous inventons avec les acteurs la vie imaginaire des personnages, dans une sorte de monologue intérieur qui se déploie hors du plateau et qui leur apporte une consistance. C’est la richesse de la vie intérieure de l’acteur-personnage qui donne la densité de la présence en scène.

 

Entretien réalisé par Gwénola David

 

A propos de l'événement

Nos serments
du jeudi 15 janvier 2015 au samedi 14 février 2015
Théâtre national de la Colline.
15 Rue Malte Brun, 75020 Paris, France

A 20h30, sauf mardi 19h et dimanche 15h30, relâche lundi. Tél. : 01 44 62 52 52.

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