Hansel et Gretel ou pourquoi j’ai arrêté de manger des enfants
Hansel et Gretel vu du côté de la sorcière, [...]
Avignon / 2015 - Entretien Laurent Fréchuret
C’est à travers l’œuvre de Samuel Beckett que Laurent Fréchuret est né à la mise en scène, il y a un peu plus de 20 ans. Aujourd’hui, après Oh les Beaux jours en 2000, l’ancien directeur du Centre dramatique national de Sartrouville crée En attendant Godot.
Qu’est-ce qui, dans l’œuvre de Samuel Beckett, vous a un jour donné envie de passer du jeu à la mise en scène ?
Laurent Fréchuret : Jeune comédien, la lecture de Molloy a agit sur moi comme un déclencheur, une véritable détonation. Aujourd’hui, je suis plus que jamais stupéfait et ébloui par cette voix qui s’adresse à nous avec des mots bruts et brûlants, qui fait surgir un univers terrible traversé par un grand rire, une pulsion de vie, une force capable d’inventer d’autres mondes.
Vous revenez à cet auteur après avoir mis en scène Oh les Beaux jours, en 2000. Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de vous replonger dans son écriture ?
L. R. : Je n’ai jamais vraiment quitté la lecture et le travail avec Beckett. Je reviens régulièrement à cette obsession joyeuse. Les années m’ont appris que le même feu peut brûler très longtemps. J’ai senti simplement que le moment était venu d’aborder Godot, la pièce la plus connue de Beckett, peut-être la plus célèbre du 20eme siècle, et qui pourtant réserve de vraies surprises, quand on l’habite et la rencontre au présent.
Qu’avez-vous envie d’éclairer à travers votre mise en scène ?
L. R. : Je vois dans Godot un combat contre l’absurde, une entreprise délicate et héroïque de civilisation, de civilité. C’est l’œuvre d’un grand poète, certes, mais aussi l’œuvre engagée d’un auteur politique. Des ruines de l’après guerre aux crises d’aujourd’hui, Godot est la tentative toujours recommencée de ne jamais renoncer au nom d’humain.
La direction d’acteurs est essentielle dans le théâtre de Beckett. Comment avez-vous guidé vos interprètes ?
L. R. : Avec Jean-Claude Bolle-Reddat, David Houri, Vincent Schmitt, Maxime Dambrin – et un enfant pour jouer l’humanité – nous nous sommes plongés dans une recherche qui relie la parole et la peau. La présence, qu’elle soit burlesque ou tragique, doit être organique. Les mots et les corps vagabonds se rapprochent, se chamaillent, s’attrapent, s’engueulent, se réchauffent, ne se lâchent plus, se disent adieu et ne se quittent jamais… Ils sont tout à la fois solitaires et solidaires. Dans ce grand voyage immobile dans le temps et l’espace, on est liés les uns aux autres. La quête philosophique débouche sur un besoin fou de chaleur humaine. La noirceur apparente de la situation débouche sur une lumière inattendue.
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
Avignon Off.
à 20h. Relâche le 14 juillet. Tél. : 04 32 76 24 51.
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