La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

En attendant Godot

En attendant Godot - Critique sortie Théâtre Clamart Théâtre Jean-Arp

Théâtre Jean-Arp / de Samuel Beckett / mes Laurent Vacher

Publié le 17 décembre 2014 - N° 228

Après Bien Lotis en 2011 et Lost in the Supermarket en 2012, le metteur en scène Laurent Vacher délaisse l’écriture de Philippe Malone pour investir celle de Samuel Beckett. Sans parvenir à convaincre.

Les Editions de Minuit, éditeur et exécuteur testamentaire de Samuel Beckett, jusqu’à récemment réputées pour surveiller de près le respect des didascalies de ses pièces, (l’écrivain, qui considérait ses indications scéniques comme parties intégrantes de ses pièces, avait lui-même, un an avant sa mort, fait bâcher le décor et interdire la bande son d’un spectacle de Gildas Bourdet), semblent depuis quelques années avoir rompu avec cette forme d’orthodoxie. On se souvient, entre autres, de la version de Fin de Partie signée par Krystian Lupa, en 2011, au sein de laquelle les poubelles de Nell et Nagg étaient remplacées par des cercueils transparents. Nouvelle preuve de la liberté aujourd’hui accordée aux metteurs en scène investissant le répertoire beckettien : la version d’En attendant Godot présentée par Laurent Vacher au Théâtre Jean-Arp. « Route à la campagne, avec arbre », écrit l’auteur irlandais pour situer sa pièce. Le fondateur de la Compagnie du Bredin choisit, lui, d’imaginer (la scénographie est de Jean-Baptiste Bellon) une zone périurbaine avec baraque, tuyaux, combiné téléphonique, fils et poteau électriques. L’idée de vide et de mystère, si présente dans l’œuvre de Beckett, disparaît ici au profit d’une situation bien réelle, celle de deux SDF vivant aux abords d’une ville.

 

Un espace rétréci

 

Ce parti pris pourrait s’avérer concluant si le miroir qu’il tend à notre époque ne donnait trop souvent l’impression d’anecdote, s’il ne gommait les perspectives, les résonnances qui confèrent ampleur et universalité à ce théâtre de la condition humaine. Au sein d’un espace comme borné, comme rétréci, Laurent Vacher pousse ses comédiens (Luc-Antoine Diquéro – Pozzo, Pierre Hiessler – Estragon, Jean-Claude Leguay – Lucky, Antoine Mathieu – Vladimir, Heidi Zada – le Garçon) vers un univers cher à l’auteur, celui du clown et du cabaret. Il le fait de manière appuyée, sans hésiter à flirter avec les lignes du surjeu. Si cette tonalité burlesque sied parfaitement à Pozzo et Lucky, elle limite considérablement la partition du couple qui leur fait face. Phagocytés par les influences loufoques des deux étranges individus qui croisent leur route, Vladimir et Estragon se laissent contaminer par leur monde. Ils glissent, peu à peu, hors de l’humanité qu’ils sont censés représenter. Et perdent ainsi toute connexion avec les souffles métaphysiques qu’une mise en scène moins restrictive aurait pu faire naître.

 

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

En attendant Godot
du mardi 13 janvier 2015 au samedi 24 janvier 2015
Théâtre Jean-Arp
22 Rue Paul Vaillant Couturier, 92140 Clamart, France

Les mardis, mercredis, vendredis et samedis à 20h30, les jeudis à 19h30, le dimanche à 16h. Tél. : 01 41 90 17 00. www.theatrejeanarp.com. Durée de la représentation: 2h15. Spectacle vu au Centre culturel L’Orange Bleue à Eaubonne.

 

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