La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Des Roses et du Jasmin

Des Roses et du Jasmin - Critique sortie Théâtre Ivry-sur-Seine Manufacture des Œillets
Des roses et du jasmin au Théâtre des Quartiers d’Ivry. CR : Nabil Boutros

Manufacture des Oeillets / texte et mes Adel Hakim

Publié le 23 janvier 2017 - N° 251

Sous la plume et la direction d’Adel Hakim, avec les acteurs du Théâtre National Palestinien, Des Roses et du Jasmin parcourt l’histoire du conflit israélo-palestinien à travers la destinée d’une famille.

Il y a de la tragédie bien sûr dans ce spectacle, celle d’une famille qui finira déchirée par l’opposition entre juifs et palestiniens. Il y a du Roméo et Juliette aussi – les initiales R&J s’affichent d’entrée de jeu derrière les acteurs – parce que l’amour, le désir y font s’embrasser les jeunes gens par-delà des conflits qui opposent leurs clans. Il y a du cabaret également, avec ces appels répétés à la fête et à la danse, à l’exaltation des sens, avec ces sortes de clowns blancs, puis rouges, qui encadrent l’action et mènent la revue des faits historiques. Il y a de l’arabe aussi, une langue qu’on se dit qu’on entend trop peu sur nos scènes, tant les acteurs du Théâtre National Palestinien la font joliment résonner en portant le texte d’Adel Hakim, secondé dans l’écriture par Mohamed Kacimi. Et bien sûr il y a l’Histoire, l’histoire d’une région sainte et maudite, à travers certains de ses épisodes éclairés de façon crue et très partielle, de l’arrivée des rescapés juifs en 1944 à l’Intifada de 1988, en passant par les expropriations des palestiniens,  la création de l’Irgoun et l’attentat du King David en 1946 contre les Anglais, la création d’Israël, l’émergence de l’OLP, la Guerre des six jours, l’invasion du Liban, Sabra et Chatila.

L’amour, le sexe, la joie

Il y a donc beaucoup de dimensions qui s’entrecroisent dans ce spectacle parfaitement scénographié et chorégraphié – on ne les a pas toutes citées -, et pourtant Des Roses et du Jasmin frappe tout du long par sa simplicité, son dépouillement, un propos aussi tranché que ce conflit est compliqué. En 1944, Miriam, jeune fille juive, a fui l’Allemagne et épouse un militaire anglais. Léa, leur fille aura à son tour un enfant, avec un palestinien cette fois. C’était avant que chaque camp ne se mure dans ses certitudes. Rose et Jasmin, leurs descendantes, en feront les frais.  Le constat, que le spectacle pose donc, c’est que les forces obscures – la pulsion de mort, la violence masculine, le désir de tout contrôler – sont dans cette région du monde en train de ravager la vie – tout particulièrement celle des femmes -, et qu’elles prennent le dessus sur les forces vitales – l’amour, le sexe, la joie… Face à cela, que peut le théâtre, si ce n’est porter cet élan de vie qui l’anime plus que tout autre art puisqu’il s’appelle spectacle vivant ? Et cet élan, le faire vibrer sur scène, l’étendre à la salle, ranimer avec lui une communauté, comme cette extraordinaire aventure humaine qu’a engendrée la mise en œuvre de Des Roses et du Jasmin, créé initialement à Jérusalem, a permis de le faire avec un théâtre palestinien en ruines. Adel Hakim, touche là, avec humilité et sobriété, au cœur du théâtre.

Eric Demey

A propos de l'événement

Des Roses et du Jasmin
du vendredi 20 janvier 2017 au dimanche 5 février 2017
Manufacture des Œillets
Manufacture des Œillets, 1 place Pierre Gosnat, 94200 Ivry-sur-Seine, France

Jusqu’au 5 février, le lundi et le vendredi à 20h, le jeudi à 19h, le samedi à 18h, le dimanche à 16h. Tél : 01 43 90 11 11. Durée : 3h.

Du 28 février au 8 mars au Théâtre National de Strasbourg.

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