La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Ça ira fin(1) de Louis de Joël Pommerat

Ça ira fin(1) de Louis de Joël Pommerat - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Porte Saint-Martin
Ça ira (1) Fin de Louis de Joël Pommerat, à ne pas manquer ! © Elisabeth Carecchio

Conception et mes Joël Pommerat

Publié le 27 mars 2019 - N° 275

Reprise de cette œuvre passionnante au Théâtre de la Porte Saint-Martin . Joël Pommerat interroge ici et maintenant l’événement fondateur de la Révolution française : une plongée tumultueuse au cœur des enjeux de l’engagement politique.

Hors normes, Joël Pommerat impressionne par son inventivité et son époustouflante maîtrise des effets scéniques. Avec un talent de magicien, redoutablement précis  et subtil, il œuvre à l’endroit de troublants frottements entre monde réel et monde imaginaire. Dans Ça ira (1) Fin de Louis,  déjà programmé à deux reprises aux Amandiers de Nanterre , plébiscité par le public et la critique, cette dimension esthétique tout en ambivalences et les thématiques de l’intime qui parcourent son oeuvre laissent place à une quête centrée sur la politique. « Il ne s’agit pas d’une pièce politique mais d’une pièce dont le sujet est la politique. » souligne Joël Pommerat. Explorant la période de 1787 à 1791, à travers des paroles publiques qui s’affrontent et jaillissent comme un flot tumultueux, la pièce déploie à plein régime la genèse des processus de prise de pouvoir, la teneur tragique des conflits entre rage émancipatrice et entêtement conservateur, et l’évolution historique depuis les élans initiaux jusqu’aux soubresauts contre-révolutionnaires.

Une mise en tension des processus d’insurrection

Grâce à la remarquable qualité du jeu et à l’épure aiguisée de la mise en scène, la réussite du spectacle est de parvenir à faire résonner aujourd’hui, à travers les cahots de la Révolution française, les questions fondamentales de la conquête et de l’exercice du pouvoir, de l’articulation entre action individuelle et collective, de la relation entre pensée et action, et des inégalités sociales qui demeurent incorrigibles. Si le metteur en scène abandonne les dispositifs bi-frontaux ou circulaires, il affirme plus que jamais une proximité avec les spectateurs, témoins donc participants dans l’agora assemblée. Le travail minutieusement documenté à partir de textes d’archives crée autour de la figure royale de Louis – le pouvoir incarné et nommé – une mise en tension des processus de contestation et d’insurrection, un feu d’artifice de paroles en action, libérant des émotions exacerbées. Là où tout se noue et se joue : entre engagement et action, bien loin d’un récit mythique de figures héroïques. Ni reconstitution historique ni théâtre documentaire, ce théâtre profondément vivant interroge le présent à travers le passé. A l’heure où notre monde individualiste peine tant à envisager une forme d’enchantement collectif, à l’heure où la contestation horizontale et brouillonne des gilets jaunes navigue entre revendications ô combien légitimes, demandes irréalistes, violence et parfois relents fascistes, cette fresque impétueuse s’avère édifiante autant que captivante !

Agnès Santi

A propos de l'événement

Ça ira fin(1) de Louis de Joël Pommerat
du samedi 13 avril 2019 au jeudi 30 mai 2019
Théâtre de la Porte Saint-Martin
18, Boulevard Saint Martin 75010 Paris

Rens : 0142080032.

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