L’Homme qui rit
La Compagnie Babylone s’empare du texte [...]
Avignon / 2013 - Entretien Alain Timár
Le directeur du Théâtre des Halles fait résonner les confessions d’une jeune femme mi-punk mi-lolita dans l’espace de la Chapelle Sainte Claire. C’est Blanche Aurore Céleste de Noëlle Renaude (interprété par Camille Carraz). Autoportrait d’une femme libre…
Qu’est-ce qui vous a mené jusqu’à ce texte de Noëlle Renaude ?
Alain Timár : C’est un texte que j’aime particulièrement et que j’envisage de mettre en scène depuis longtemps. Mais je ne voulais pas le faire avant d’avoir rencontré la comédienne exactement taillée pour ce rôle, c’est-à-dire capable d’incarner toute la profondeur et tous les paradoxes de ce personnage.
Pourriez-vous nous en dire plus sur cette femme ?
A. T. : Blanche Aurore Céleste est une allégorie de femme d’aujourd’hui qui se pose la question de la liberté et de l’indépendance. Mi-punk, mi-lolita, entre innocence et ruse, elle dresse des bilans provisoires de ses vies, passe en revue les hommes qu’elle a connus, ou qu’elle imagine avoir connu. Car il s’agit d’une personne pleine d’ambiguïtés. On ne sait d’ailleurs jamais vraiment si elle fantasme ou si elle dit la vérité. Vêtue d’un blouson de cuir, accrochée à son smartphone, elle est à la fois timide et extravertie, sage et dévergondée, concrète et rêveuse. Devant nous, elle se lance dans un questionnement profond sur son existence, sur sa condition de femme, sur son identité.
Votre rencontre avec Camille Carraz a été le déclic qui vous a décidé à mettre en scène ce monologue. En quoi cette comédienne correspond-elle intimement à ce rôle ?
A. T. : Camille Carraz possède en elle la complexité et le mystère de ce personnage. Comme Blanche Aurore Céleste, elle paraît au premier abord timide, puis dévoile peu à peu quelque chose de beaucoup plus révolté. Un glissement s’opère entre la femme qu’elle est dans la vie et le rôle qu’elle incarne sur scène. Je joue de sa personnalité pour investir les oppositions que révèle le personnage de Noëlle Renaude. Camille Carraz manie les paradoxes avec beaucoup d’aisance. Sous sa réserve de surface, une force vitale couve, un volcan intérieur qui ne demande qu’à sortir, qu’à entrer en éruption.
Quel sens souhaitez-vous donner, à travers votre mise en scène, à ce texte ?
A. T. : Tout d’abord, il faut préciser que j’ai choisi de mettre en scène ce spectacle non pas dans la Salle du Chapitre, mais dans la Chapelle Sainte Claire du Théâtre des Halles. Je souhaite que les spectateurs, en entrant dans la chapelle, aient l’impression qu’elle est encore en activité, qu’il s’agit non pas d’une salle de spectacle, mais d’un lieu de culte. Comme si Blanche Aurore Céleste, après une errance dans la ville, entrait dans une église pour se confesser, pour livrer tout ce qu’elle a sur le cœur. Comme si elle répondait ainsi à une nécessité absolue de dire qui elle est, ce qu’a été sa vie, réelle ou imaginaire.
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
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