20 ans après, Jérémie Le Louët et les Dramaticules recréent « Macbett » de Ionesco et revisitent la force du théâtre
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Alain Françon met en scène Oh les beaux jours avec Dominique Valadié dans le rôle de Winnie. Dans l’or du soir qui tombe sur un désert bosselé, la comédienne est – évidemment – éblouissante.
D’abord écrite en anglais et créée en 1961 à New York, puis à Londres l’année suivante, la pièce de Samuel Beckett a été jouée en français pour la première fois à l’Odéon en 1963, dans la mythique mise en scène de Roger Blin, avec Madeleine Renaud et Jean-Louis Barrault. Elle est devenue, depuis, une gageure et un trophée : d’abord parce que le mamelon qui emprisonne Winnie impose une scénographie rappelant forcément les précédentes et invitant à la comparaison, ensuite parce que l’interprète qui se voit confier son rôle y révèle à la fois sa personnalité et la qualité de la rencontre avec son metteur en scène, enfin parce que la pièce dit de manière suraiguë les affres de la condition humaine, et qu’il faut avoir du coffre et du métier pour affronter un tel défi. Inutile de préciser que Dominique Valadié est une immense comédienne – sa carrière le prouve assez – et que la relation de travail qu’elle entretient depuis longtemps avec le metteur en scène Alain Françon offre un spectacle d’une lumineuse évidence.
Poppée de son
La comédienne est une Winnie à la fois enfant et reine. Elle règne sur le désert, créé autour d’elle par Jacques Gabel et éclairé par Jean-Pascal Pracht, avec l’illusion d’être un empire dans un empire. Bien des humains partagent cette folie que renforcent le jeune âge et le pouvoir, jusqu’à ce que l’entendement se décille ou que la nécessité impose ses lois à l’imprudent qui se croit le pivot du monde. La perruque en choucroute peroxydée aux boucles en cascade, imaginée par la toujours intelligente Cécile Kretschmar, transforme Dominique Valadié en Poppée, à la fois impératrice et petite fille. Elle rit, crie, parle à Willie (Alexandre Ruby), fouille dans son sac, observe la fourmi avec le sérieux des enfants, et met du rouge à lèvres avec l’application de celles qui n’ont pas renoncé à plaire. La comédienne campe une Winnie touchante et profondément humaine : elle n’est pas seulement une vieillarde dont le monde se rétrécit ; elle n’est pas seulement une coquette menacée par la ptose ; elle n’est pas seulement une oubliée drapée dans l’élégante posture de l’anachorète ou une résignée faisant de nécessité vertu. Elle est tout cela et bien plus encore : elle est la prise de conscience progressive et inéluctable que toute chose a une fin. « Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie que de n’être pas fou » : ainsi Winnie a-t-elle résisté jusqu’au bout, dans sa folie. Mais cette Winnie-là achève sa course avec un sourire serein et amusé aux lèvres, puisque tout est théâtre, même le théâtre.
Catherine Robert
à 19h. Du jeudi au dimanche (du 13 novembre au 14 décembre), du mercredi au dimanche (du 17 décembre au 17 janvier, sauf les 24, 25, 31 décembre et le 1er janvier). Tél. : 01 42 08 00 32. Durée : 1h20.
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