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Avignon / 2022 - Entretien / Pierre-Yves Chapalain
Pierre-Yves Chapalain crée un spectacle itinérant susceptible de se déployer dans tous types d’espaces. En particulier en milieux ruraux, comme l’indique son titre, À l’orée du bois. Sous la forme d’un oratorio qui vire au fantastique, l’auteur et metteur en scène y raconte l’histoire d’une femme et d’un homme qui ne voulaient plus se sentir robots.
L’histoire des personnages centraux d’À l’orée du bois, un couple de citadins qui décide de changer de vie en s’installant sur le domaine familial, nous renvoie à une actualité récente : celle de la pandémie, qui a suscité bien des désirs de retour à la terre. Est-ce là votre inspiration pour l’écriture de cette pièce ?
P-Y.C. : La première raison est autre : elle tient au fait que mes parents étant agriculteurs, je suis toujours beaucoup allé à la campagne. La question d’une autre vie possible que celle que je mène, dans le milieu du théâtre, a donc toujours été présente à mon esprit. Je me demande souvent comment je ferais si je voulais être entièrement autonome, dans tous les domaines. Cela confinerait sans doute au burlesque ! C’est le cas pour le couple de néo-ruraux de À l’orée du bois. S’ils s’imaginent au départ que la transition va se faire sans difficultés, ils se rendent vite compte de leur erreur.
L’histoire de ce couple est notamment portée par un personnage du nom de Coryphée. Pourquoi cette référence au théâtre grec ?
P-Y.C. : Devoir créer une forme itinérante, pouvant se jouer en extérieur comme en intérieur, m’a mené à imaginer une forme de théâtre de tréteaux où les artistes – Kahena Saïghi dans le rôle de la femme, qui co-signe aussi avec moi la mise en scène, Madeleine Louarn en Coryphée, Pablo Pensavalle en DJ et moi-même en mari – n’ont besoin que d’un système de diffusion du son et d’un tas de cageots en guise de scénographie. Il s’agit d’une sorte d’oratorio qui fait penser au théâtre grec.
Un autre motif évoque le théâtre grec : celui des fêtes sauvages organisées autour du village par un personnage mystérieux.
P-Y.C. : Ce motif m’a en effet été inspiré par Les Bacchantes, tragédie d’Euripide de – 405 avant J.-C., où Dionysos rentre dans sa ville natale, Thèbes, et se venge de son cousin Penthée à l’aide des femmes – les bacchantes – qui lui rendent un culte. Dans le village d’À l’orée du bois, les fêtes sauvages qui suscitent autant d’attirance que de répulsion nous permettent de tisser un fil dionysiaque. Ce qui m’intéresse d’abord pour le rapport très étroit que cela crée avec le public, investi d’un rôle central : il tient le rôle des travailleurs de la terre, de ceux qui observent les nouveaux venus.
Que voulez-vous dire de l’époque à travers vos deux protagonistes qui changent de vie ?
P-Y.C. : Un peu paumé, se laissant aller à ce qui advient, le couple d’À l’orée du bois est à l’image de notre époque, du moins telle que je la vois. Il est comme nous tous, à ne pas savoir quoi faire avec les problèmes écologiques, sociaux, politiques qui s’abattent sur nous. Il incarne aussi un désir de remettre en route notre instinct, de chercher à quel endroit on se sentirait le moins robot, le plus capable de réactiver nos facultés sensibles.
Propos recueillis par Anaïs Heluin
à 20h. Relâche les 10, 11, 17 et 24 juillet. Tél : 04 90 14 14 14. Durée : 55 minutes.
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