Résurrection de Fauvel par l’ensemble Sequentia et Benjamin Bagby

France, 1315. Philippe IV le Bel est mort et le royaume glisse vers le chaos, politique, économique et religieux, avec la persécution des Templiers et le schisme papal d’Avignon. Des artistes et des intellectuels font circuler une allégorie subversive, sous forme de satire animalière, le Roman de Fauvel, qui décrit les péripéties d’un pays gouverné par une bête monstrueuse et stupide, avec la complicité d’élites corrompues et serviles. Si le manuscrit originel ne comporte pas d’indications musicales, une révision achevée en 1318 a été fixée dans l’un des plus grands trésors enluminés de la Bnf, qui, en plus de l’enrichissement du texte, ajoute 169 numéros musicaux, synthétisant les genres en pratique à l’époque, du chant liturgique à la parodie et aux différentes formes de la chanson en usage au début du XIVème siècle. Il n’y a pas de certitude quant à une éventuelle destination scénique de l’ouvrage, mais Benjamin Bagby, un des meilleurs spécialistes actuels du répertoire médiéval avec son ensemble Sequentia, a choisi, à l’heure du 700ème anniversaire de Fauvel, de le représenter, en s’appuyant sur les derniers développements de la recherche littéraire, et de le faire résonner avec notre époque. Cette résurrection contemporaine sera confiée à Peter Sellars. Il fera équipe avec Alice Goodman, la librettiste de Nixon in China de John Adams, qui actualisera le texte et sa portée corrosive en mêlant pastiche de roman médiéval et peinture de notre monde d’aujourd’hui. Le Moyen-Âge n’a peut-être jamais été si proche de nous.

Gilles Charlassier