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Écrit et mis en scène par Davide Carnevali, interprété par Marcial Di Fonzo Bo, Portrait de l’artiste après sa mort (France 41 – Argentine 78) est présenté au Quai, à Angers, dans le cadre du Festival Écritures en acte. Une enquête historique aux airs de théâtre documentaire qui fait briller les perspectives virevoltantes d’un jeu de miroirs à multiples dimensions.
Dans cette enquête labyrinthique d’une grande intelligence, rien n’est ni jamais vraiment sûr, ni totalement incertain. Tout se cherche, se trouve, échappe, tourbillonne entre présent et passé, illusion et réalité, inventions théâtrales et faits biographiques liés à l’existence du comédien Marcial Di Fonzo Bo et de l’auteur-metteur en scène Davide Carnevali. Créé dans sa version française à la Comédie de Caen en décembre 2023 (le texte est publié aux Solitaires Intempestifs), Portrait de l’artiste après sa mort (France 41 – Argentine 78) nous raconte de façon directe et circonstanciée comment Marcial Di Fonzo Bo, il y a deux ou trois ans, aurait reçu une lettre du ministère argentin de la justice et des droits humains. Cette missive l’aurait informé qu’il serait l’héritier, à Buenos Aires, d’un appartement ayant été acheté par un homme portant le même nom que lui, après avoir été confisqué, en 1978, à l’époque de la dictature militaire, à un musicien nommé Luca Misiti, dissident politique disparu sans laisser de traces. La famille de ce dernier aurait d’ailleurs saisi la justice pour obtenir la restitution dudit appartement. C’est ce que révèle Marcial Di Fonzo Bo en début de représentation, s’adressant aux publics comme si ses propos étaient improvisés et non extraits d’une pièce de théâtre.
Effets de réel et mystères mélancoliques
Le comédien-personnage relate par la suite le séjour qu’il aurait effectué dans la capitale argentine, en compagnie de Davide Carnevali, afin de tenter d’éclaircir les multiples mystères liés à ces faits, notamment la disparition d’un compositeur juif, dans la France de l’Occupation. Des partitions de ce dernier, annotées par Luca Misiti, auraient été retrouvées dans l’ancien appartement de celui-ci. L’existence des deux musiciens présenteraient, en outre, d’étranges similitudes… Mais ce voyage à Buenos Aires aurait également eu un autre but : récolter divers matériaux en vue de réaliser un spectacle documentaire autour de cette histoire. Vous l’aurez-compris, c’est ce supposé spectacle auquel nous assistons, embarqués dans un jeu de miroirs étourdissant qui rend hommage à la mémoire des desaparecidos — citoyens argentins secrètement arrêtés et tués, entre 1976 et 1983 — et aux victimes de la Shoah. Tout cela est brillant. Impeccablement mise en scène et interprétée, cette composition autofictionnelle oscille entre malice et mélancolie. On pense à Borges, à Vila-Matas. On est saisi par la barbarie de régimes fascistes du passé qui résonne, de façon vive, troublante, avec les incertitudes de notre présent.
Manuel Piolat Soleymat
Les 26, 28, 29 et 30 avril 2025 à 19h ; les 5, 6 et 7 mai à 20h.
Durée : 1h30. Tél. : 02 41 22 20 20. www.lequai-angers.eu
Spectacle vu le 18 novembre 2024 au Théâtre de la Bastille à Paris.
Pièce polyphonique de l’autrice britannique [...]