La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

L’Homme qui rit

L’Homme qui rit - Critique sortie Théâtre
Crédit : DR Légende : Camille Pelicier et Antoine Philippot, Déa et Gwynplaine à La Courneuve.

Publié le 10 février 2010

La troupe du Centre dramatique de La Courneuve a choisi la jeune metteur en scène Marion Lécrivain pour revisiter Hugo en sa compagnie. Un beau travail d’adaptation et d’interprétation.

Les comédiens de La Courneuve travaillent depuis toujours à proposer une création annuelle qu’ils interprètent de leur solide talent et animent avec leur passion obstinément engagée. Choisissant régulièrement de se laisser guider par des metteurs en scène qui offrent à chaque fois une texture originale et une couleur différente à leurs spectacles, et privilégiant des textes et des auteurs qui parlent au monde de lui-même avec force et conviction, ils ont invité cette année Marion Lécrivain et s’emparent avec elle des mots de Victor Hugo. La jeune metteur en scène a adapté L’Homme qui rit avec art abouti de la synthèse, parvenant à résumer le fleuve de la logorrhée du poète en en conservant le lyrisme et l’émotion. Damiène Giraud, Wahid Lamamra, Jean-François Maenner, Jean-Pierre Rouvellat, Camille Pelicier (poignante Déa) et Antoine Philippot (inspiré Gwynplaine) incarnent les personnages de cette fresque morale et font revivre avec assurance et ingéniosité le souffle puissant du roman.
 
Un théâtre populaire et de qualité
 
Elevé par un loup et un bateleur philosophe, aimé d’une jeune aveugle et désiré par une aristocrate cherchant à tromper son ennui dans ses bras de monstre, se découvrant pair d’Angleterre, tonnant en vain contre la misère et retrouvant trop tard, au moment de mourir avec eux, l’amour si pur de ses compagnons d’infortune, Gwynplaine est le symbole d’une humanité mutilée et calamiteuse. Il tend aux puissants sardoniques le miroir de sa propre face derrière laquelle se cache son âme haute et loyale que seule Déa, la jeune aveugle, parvient à voir. Sur un plateau incliné qui permet efficacement de jouer de la distance pour signifier la chute et l’ascension dérisoire du héros ainsi que la hauteur et la morgue des aristocrates ; sur une avant-scène qui se fait grève désolée, lande aride ou tréteaux de l’infortune et du rictus terrifiant du malheureux Gwynplaine, les comédiens de La Courneuve passent avec efficacité d’un rôle à l’autre, entourant le couple de jeunes gens qui interprètent avec intensité les deux malheureux amants trop lucides. Les belles lumières de Julien Barbazin participent à la cohérence esthétique de l’ensemble. Le tout compose un spectacle à la fois économe et inventif, marqué au sceau d’un théâtre élitaire pour tous, fidèle en cela aux engagements de la troupe valeureuse de La Courneuve et à la figure tutélaire du vieil Hugo, autre fervent d’un art populaire et de qualité.
 
Catherine Robert


L’Homme qui rit, d’après Victor Hugo ; adaptation et mise en scène de Marion Lécrivain. Du 28 janvier au 21 février 2010. Mercredi, vendredi et samedi à 20h30 ; jeudi à 19h ; dimanche à 16h30. Centre culturel Jean-Houdremont, 11, avenue du Général Leclerc, 93120 La Courneuve. Réservations au 01 48 36 11 44.

A propos de l'événement


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