La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Les Armoires normandes

Les Armoires normandes - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre des Bouffes du Nord
Un drôle de sirtaki pour clore Les Armoires normandes. CR : Philippe Lebruman

Bouffes du Nord / par les Chiens de Navarre

Publié le 24 février 2015 - N° 230

Régénérés et régénérants, les Chiens de Navarre proposent une nouvelle création, Les Armoires normandes, qui aborde la thématique de l’amour avec un sacré mordant.

Les Chiens de Navarre changent. «  Le temps passe, on a  tous plus ou moins 40 ans et on n’a plus envie de s’amuser à faire des partouzes  », explique Jean-Christophe Meurisse, en faisant référence aux scènes orgiaques des précédents spectacles, qui faisaient beaucoup parler et surtout énormément rire. Dans une veine plus intime, la troupe des Chiens de Navarre – enrichie de trois nouveaux comédiens – s’attaque donc au plus universel des sujets : l’amour. « Pour traiter ce sujet, il fallait une fresque » continue le metteur en scène de la troupe. Aux constructions éclatées des opus précédents, succède donc un spectacle où s’esquisse une continuité narrative (ténue), qui permet notamment de souligner le cruel écart entre le temps des promesses et les désenchantements qui lui succèdent. Pour autant, les évolutions esthétiques et le titre en mode terroir de cette dernière création ne doivent pas laisser croire que les Chiens sont rentrés dans le rang. En témoigne une petite scène digne d’une animation Club Med, où l’on s’éclate des ballons collés aux fesses à grands coups de bassin. Les Chiens restent les Chiens, et ce pour notre plus grand plaisir.

Humour singulier

Pour commencer, un Christ ensanglanté qui a le vertige sur sa croix et prend des poses comme dans les tableaux. Ensuite, un homme seul qui ne nous épargne rien de son intimité. Des interviews de couple sur canapés. Une rencontre. Un mariage. Des disputes. Une séance de spiritualisme… Rien ne sert en fait de raconter les scènes que déroule le spectacle puisque ce qui compte avant tout avec les Chiens reste bien leur manière de faire. Comment la qualifier ? On est au bord de la série de sketches. On flirte avec l’humour facile. On n’hésite pas à faire dans le graveleux. Et pourtant, quelque chose subsiste qui rend le rire toujours intelligent et émouvant, leur humour singulier et inventif. Bien sûr, leur procédé créatif y est pour beaucoup : travail collectif au plateau à partir d’impros, de situations, de canevas, et représentations à géométrie variable exigeant un jeu toujours en prise avec le présent de la scène. Si les Chiens de Navarre changent dans cette création, c’est surtout qu’ils ont varié les dispositifs – la belle innovation scénique du doublage micro en direct que l’acteur sur scène s’efforce de suivre –, qu’ils ont délaissé certaines afféteries plastiques, et  qu’ils approfondissent les années passant leur mise à nu de l’humain, avec un humour toujours aussi corrosif, augmenté d’une triste tendresse, profondément touchante, pour la fragilité de chacun.

Eric Demey

A propos de l'événement

Les Armoires normandes
du mardi 3 mars 2015 au dimanche 22 mars 2015
Théâtre des Bouffes du Nord
37 Boulevard de la Chapelle, 75010 Paris, France

20h30. Le dimanche à 16h. Tel : 01 46 07 34 50. Durée : 1h40. Spectacle vu à la Maison des Arts de Créteil.

 

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