De Bach à Thierry Escaich par l’Orchestre de Paris
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Classique / Opéra - Entretien / Nicolas Frize
Le compositeur Nicolas Frize propose deux nouvelles œuvres in situ : une déambulation musicale en pleine nature dans le Parc départemental du Sausset et un hommage à Michel Foucault. Deux expériences singulières de cet « écouteur public » qui n’a de cesse de nous faire ouïr notre monde.
Vous avez souvent composé pour, avec et au sein de structures sociales : usines, prisons, écoles, institutions… Avec votre nouvelle création, vous emmenez l’auditeur à la rencontre de la nature.
Nicolas Frize : Oui, le Parc du Sausset, classé Natura 2000, est même un espace où se joue une certaine antinomie entre la présence humaine et la nature. Ici, ce ne sont pas les hommes et les femmes qui fréquentent le lieu – à l’exception des botanistes avec qui j’ai travaillé pendant deux ans – qui sont le point de départ, mais la nature elle-même : ces arbres qu’on ne voit plus tellement ils sont présents et en apparence immobiles. Ce qui m’intéresse, c’est cet invisible, cet indicible et cette incroyable gratuité du végétal, dénué d’intention, agissant par opportunité et par hasard. Les arbres sont en dynamique constante, jamais en équilibre.
Comment rendez-vous compte de cela en musique ?
N.F. : Il faut donner à observer la diversité de cet espace. J’ai imaginé un parcours depuis les pelouses vers la forêt, de l’absence de biodiversité vers un écosystème beaucoup plus complexe où la nature agit librement, à l’abri de la présence humaine. Un parcours musical, fait de seize séquences inspirées par la connaissance du monde végétal – germination, dissémination, cohabitation, vie et chaos… – mais aussi visuel, avec des installations et des œuvres (peinture, dessin, photographie) distribuées au public. La déambulation mène à une clairière entourée de lauriers gigantesques où des botanistes viendront mettre des mots sur ce qui aura été observé sur le parcours.
Quels sont les interprètes ?
N.F. : Ils diffèrent pour chaque lieu et chaque aspect de la vie végétale : dans la prairie, quatre clarinettes tournées vers le soleil ; dans le sous-bois, onze percussionnistes et un baryton pour évoquer la circulation des matériaux portée par les animaux ou les champignons ; plus loin, les traits multiples de quatre violons pour évoquer ces milliards de graines offertes au vent par les arbres ; trois chanteurs et quatre clarinettes pour évoquer la nuit…
Votre création suivante vient un peu en opposition, dans un lieu complètement façonné par l’homme au service de ses utopies politiques.
N.F. : C’est un hommage à Michel Foucault et à son concept d’hétérotopie : des lieux concrets qui sont le support d’autres lieux, ceux-ci imaginaires. L’Espace Niemeyer, siège du Parti communiste, est évidemment l’un de ces lieux où s’inventent les utopies qui nourrissent à leur tour d’autres lieux. La musique, à ce jour [le 28 mars, NDR] en cours d’élaboration, s’appuiera sur des instruments « doubles » : violoncelle/viole de gambe, guitare acoustique/électrique, flûte/traverso…
Propos recueillis par Jean-Guillaume Lebrun
à 15h et 19h30.
Avec Michel Foucault. Espace Niemeyer, place du Colonel Fabien, 75020 Paris. Lundi 23 juin à 20h.
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