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Théâtre - Entretien

L’Avare

L’Avare - Critique sortie Théâtre Paris Odéon-Théâtre de l’Europe
Le metteur en scène Ludovic Lagarde. Crédit : Guillaume Gellert

Odéon – Théâtre de l’Europe / de Molière / mes Ludovic Lagarde

Publié le 23 mai 2018 - N° 266

Entre drôlerie et violence, Ludovic Lagarde s’empare de L’Avare. Le directeur de la Comédie de Reims signe une comédie noire au sein de laquelle le rôle d’Harpagon est interprété par Laurent Poitrenaux.

Avec L’Avare vous abordez pour la première fois, non seulement une pièce de Molière, mais aussi un grand classique français. Quelle relation entretenez-vous avec ce répertoire ?

Ludovic Lagarde : Une relation assez lointaine. Finalement, je suis entré dans le XVIIème Siècle à travers l’opéra baroque, notamment en mettant en scène une œuvre de Lully. Avant cela, il y avait une forme de distance entre mon univers et les classiques, ce qui ne veut pas dire qu’une envie n’était pas là. Parfois, en tant que metteur en scène, on trouve des pièces très belles, mais pour prendre la décision de créer un spectacle, il faut avoir une vision précise de ce que l’on peut apporter à ces textes. Et puis, sans savoir pourquoi, un jour, c’est le moment : cette vision surgit. C’est ce qui s’est passé pour L’Avare. Je me suis plongé dedans totalement par hasard, et j’ai été frappé par la langue. Cette prose enfiévrée et assez noire s’est mise à me parler immédiatement.

« L’Avare est une pièce d’autant plus drôle qu’elle est noire. »

 Vous avez demandé à Laurent Poitrenaux de jouer Harpagon. Qu’est-ce que ce choix révèle du regard que vous portez sur cette pièce et ce personnage ?

L.L. : Ce choix s’est imposé à moi comme une évidence. Laurent Poitrenaux peut incarner toutes les facettes d’Harpagon : sa virtuosité, sa drôlerie, sa violence, sa cruauté aussi… Très vite, j’ai eu l’intuition que l’on pouvait aborder L’Avare « les yeux dans les yeux », dans un rapport très concret, très réaliste, en mettant à distance les conventions de jeu généralement associées à ce théâtre. On a l’habitude de confier le rôle d’Harpagon à des comédiens plus âgés que Laurent. Effectivement, on peut percevoir chez ce personnage les oripeaux de la vieillesse, le ridicule… Mais je crois qu’il s’agit avant tout d’un homme extrêmement vaillant, brillant, en pleine possession de ses moyens, un homme qui exerce son pouvoir de manière violente et tyrannique.

Cette violence est, avec le rire, au centre de votre mise en scène…

L.L. : Oui, car si on met de côté la dimension comique de L’Avare, on s’aperçoit qu’il s’agit d’une pièce d’une grande dureté, d’une grande noirceur. Lorsqu’on s’arrête sur certaines scènes, on n’est parfois vraiment pas loin du réalisme tendu, violent des films d’Ingmar Bergman, par exemple de Fanny et Alexandre. Bien sûr, chez Molière, la caricature est toujours présente derrière la tension. Et le rire provient également de la violence. Finalement, L’Avare est une pièce d’autant plus drôle qu’elle est noire.

 

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

L’Avare
du samedi 2 juin 2018 au samedi 30 juin 2018
Odéon-Théâtre de l’Europe
place de l'Odéon, 75006 paris

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h. Relâche les lundis et le dimanche 3 juin. Tél. : 01 44 85 40 40. www.theatre-odeon.eu

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