La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

La Nuit tombe…

La Nuit tombe… - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre des Bouffes du Nord
Une chambre d’hôtel où les vivants et les morts se heurtent. © Elisabeth Carecchio

Bouffes du Nord / texte et mes Guillaume Vincent
CRITIQUE

Publié le 18 décembre 2012 - N° 205

Après Marivaux, Lagarce, Wedekind, Guillaume Vincent écrit et met en scène sa première pièce, un songe fantastique captivant  où le réel  est traversé de fantômes et de tensions. Une atmosphère fantastique et instable profondément originale. 

Guillaume Vincent invente dans La Nuit tombe…, pièce créée lors du Festival d’Avignon 2012, un monde singulier, inquiétant et énigmatique, un monde de sensations troubles où les vivants et les morts se heurtent, où les repères se brouillent, où l’épouvante se tapit au détour d’une porte. « Un monde qui vrille sous le poids du réel. Un monde où la réalité se substitue au fantasme. » Dans une chambre d’hôtel vieillotte, unique décor, trois histoires télescopant passé et présent se succèdent et s’entremêlent. La scène est une chambre d’échos où le temps a totalement perdu son côté linéaire, et l’espace en dehors de cette chambre surannée demeure totalement indéterminé, comme délocalisé.  Tout commence avec une mère stressée, qui donne un bain à sa petite fille et attend un coup de fil. Puis une mère encore, et son fils qui retombe en enfance, tétanisé par un frère disparu. On retrouve ensuite ce fils réalisateur qui  harcèle et gifle son actrice. Et deux demi-sœurs très différentes viennent assister au mariage de leur père : les bouquets ressemblent ici à des couronnes mortuaires. Tous traversent des drames et des épreuves, sont confrontés à la disparition et la perte. Les six comédiens interprètent remarquablement  ces états limites, ces états d’êtres au bord du gouffre, ces instants de vie saisis au vol, alors que la mort rôde et que la peur peut saisir certains…

Espace temps irréel

Le jeune auteur et metteur en scène, issu de l’école du Théâtre National de Strasbourg, réussit brillamment à restituer cette atmosphère fantastique, instable et vacillante, par son talent de metteur en scène plus que d’auteur. Le texte en effet ne laisse émerger que des bribes d’histoires et des instantanés de situations, des fragments plus superficiels qu’approfondis, éclatés et morcelés, parfois surprenants et tranchants. En toute logique, ce qui compte dans un espace-temps aussi dilaté et irréel, ce ne sont pas les histoires ni la littérature, c’est plutôt la création d’un univers original et quasi sensoriel. A cet égard, le spectacle est vraiment une réussite, grâce au jeu théâtral, grâce aussi à la façon dont la scénographie est exploitée, et à un travail visuel et sonore extrêmement soigné et précis. Evidemment, un tel univers évoque aussi le cinéma,  et notamment des auteurs tels que David Lynch ou Hitchcock.  Une œuvre à découvrir, mettant en forme un scénario fantasmagorique tendu.

Agnès Santi

A propos de l'événement

du vendredi 11 janvier 2013 au samedi 2 février 2013
Théâtre des Bouffes du Nord
37 bis bd de La Chapelle, 75010 Paris

Théâtre des Bouffes du Nord - en collaboration avec le Théâtre de La Colline -,  37 bis bd de La Chapelle, 75010 Paris. Du 11 janvier au 2 février du mercredi au samedi à 21h, mardi à 19h, dimanche 16h. Au programme aussi Rendez-vous Gare de l’Est du même auteur. Tél : 01 44 62 52 52 / 01 46 07 34 50. Pièce vue au festival d'Avignon 2012.
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