La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Gros Plan

La Charrue et les Etoiles

La Charrue et les Etoiles - Critique sortie Théâtre
©V. Arbelet Légende : Irène Bonnaud s’empare du texte de Sean O’Casey, ancré dans la révolte irlandaise de 1916. Un univers tragique aux accents de farce...

Publié le 10 février 2009

Irène Bonnaud met en scène l’univers de Sean O’Casey, à la fois tragique et drôle, réaliste et extravagant, à travers l’une de ses pièces emblématiques, d’une incroyable vitalité et d’une brûlante actualité.

La Charrue et les Etoiles : « Un de ces moments où la politique fait violemment irruption dans la vie de tous, même de ceux qui juraient ne rien vouloir avoir à faire avec elle. » Comme dans ses précédentes mises en scène – Tracteur d’Heiner Müller, Lenz de Georg Büchner ou encore Music Hall 56 de John Osborne -, Irène Bonnaud choisit un texte qui mêle la petite et la grande histoire (souvent avec une grande hache), le social et l’intime, la guerre et la chambre à coucher. Nous sommes en Irlande, à la veille de l’insurrection sanglante de Pâques 1916, où les Irlandais membres de l’Irish Citizen Army ( dont O’Casey fut secrétaire en 1914) et de l’Irish Volunteers Force se révoltent contre l’armée britannique, qui exerce ensuite une implacable répression. Un épisode marquant de l’histoire irlandaise, qui demeure en mémoire par le nombre de ses morts. Né dans une famille protestante très pauvre, O’Casey (1880-1964), dramaturge majeur de la scène irlandaise, est demeuré toute sa vie un socialiste engagé ; nationaliste convaincu au début du siècle, il est cependant peu enclin à se laisser aveugler par de grandes illusions, et dénonce l’absurdité amère de dérives qui condamnent des innocents.

Un héroïsme voué à l’échec

Loin d’une littérature de propagande, la pièce ne glorifie pas la violence nationaliste mais souligne au contraire les contradictions d’une politique et d’un héroïsme voués à l’échec, ce qui vaut à O’Casey d’être très mal jugé de l’opinion publique irlandaise lorsque le texte est créé par l’Abbey Theatre en 1926. Bien sûr, l’extrême contemporanéité de l’œuvre est évidente. « Le théâtre irlandais a une longueur d’avance pour décrire les soubresauts de notre actualité immédiate. Affrontements inter-religieux, situation de guerre civile, terrorisme, appel au sacrifice, culte des martyrs et fanatisme ont été le lot quotidien de l’Irlande depuis si longtemps que son théâtre paraît le miroir de notre monde. » Au centre de l’œuvre, un jeune couple, Nora et Jack Clitheroe, locataires d’un immeuble de Dublin. Jack rejoint une organisation terroriste qui veut délivrer le pays de l’occupation étrangère avec pour drapeau “la charrue et les étoiles“, un symbole du travail et de l’utopie. Irène Bonnaud souligne la vitalité de ce théâtre, d’un réalisme sans concession, intensément tragique et pourtant empli de bonne humeur et de scènes de farce. Avec Christophe Triau, elle signe une nouvelle traduction et veut éviter les limites de la contextualisation historique pour au contraire laisser voir la banalité, la proximité et la crudité des histoires, ainsi que la poignante douleur des hommes. Un enjeu théâtral stimulant, qui affronte le réel à travers une écriture contrastée comme la vie, où le tragique côtoie le comique.

Agnès Santi


La Charrue et les Etoiles de Sean O’Casey, traduction Irène Bonnaud et Christophe Triau, mise en scène Irène Bonnaud, du 4 au 20 février, au Théâtre Dijon Bourgogne, Parvis Saint-Jean, rue Danton, 21000 Dijon. Tél : 03 80 30 12 12.

A propos de l'événement

Dijon

x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur le Théâtre

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur le Théâtre