La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

La Barque le soir

Silences, pénombre, fulgurances : Claude Régy présente La Barque le soir de Tarjei Vesaas au Centquatre. Yann Boudaud, Olivier Bonnefoy et Nichan Moumdjian composent un saisissant face-à-face avec la mort. 

Reprise/Le Centquatre / de Tarjei Vesaas / mes Claude Régy

Publié le 28 septembre 2013

Silences, pénombre, fulgurances : Claude Régy présente La Barque le soir de Tarjei Vesaas au Centquatre. Yann Boudaud, Olivier Bonnefoy et Nichan Moumdjian composent un saisissant face-à-face avec la mort. 

C’était l’une des propositions les plus enthousiasmantes de la saison théâtrale 2012/2013. Claude Régy reprend aujourd’hui La Barque le soir*, sur le plateau du Centquatre, dans le cadre du Festival d’Automne à Paris. « Dans ce texte, confiait le grand metteur en scène au sein de nos colonnes, en septembre 2012 (La Terrasse n° 201), Tarjei Vesaas a trouvé le moyen de s’approcher de ce qu’il y a de plus inexplicable, de plus inexprimable: la mort. Et cette chose-là entre dans ma grande obsession de ne pas opposer les contraires, mais de les mettre ensemble, pour voir s’il ne peut pas naître un nouveau matériau qui serait fait des deux domaines que l’on croit opposés. Il est question ici de la grande opposition entre la vie et la mort. » A partir de cette opposition fondamentale, Claude Régy compose un spectacle subjuguant. La puissance de ce qui nous est donné à entendre, à ressentir, à entrevoir, à imaginer dans La Barque le soir est telle, que tous les brouhahas de l’existence se dissipent d’eux-mêmes, instantanément, pour laisser place au monde parallèle que fait naître le metteur en scène. Un monde fait de profondeur, de silences, de mystère, d’élévation, d’obscurité.

 

Un au-delà du visible

 

Pour la seconde fois (après Brume de Dieu, en 2010), Claude Régy retrouve le monde de l’écrivain norvégien Tarjei Vesaas (1897-1970). On est ici face à un être qui fait l’expérience de la mort et de l’au-delà du visible. Cet homme choisit de se perdre, se laisse glisser dans l’eau mouvante d’une rivière, est englouti par les flots puis ramené à l’air libre par l’effet de courants. Là, tenu par un bout d’arbre, ni pleinement vivant ni encore mort, il expérimente un état inconnu. Un état au sein duquel les contraires se rejoignent dans un rapport renouvelé à la réalité. C’est la voix de Yann Boudaud qui fait surgir et irradier les mots de Voguer parmi les miroirs (partie du roman dont est extrait le texte du spectacle). C’est son corps qui fait vivre tous les chocs, tous les mouvements sinueux de cette plongée hypnotique. La densité de sa présence est captivante. Hanté par les ombres muettes de Nichan Moumdjian et Olivier Bonnefoy, le comédien ne se contente pas d’investir l’univers théâtral de Claude Régy (lenteur, silences, scansion au ras de chaque syllabe), il se le réapproprie avec toute la force, toute l’authenticité des grandes interprétations. Dans une invitation bouleversante à la perte, à l’ailleurs et à l’oubli.

 

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

La Barque le soir
du mardi 24 septembre 2013 au jeudi 24 octobre 2013
Le Centquatre
5 rue Curial, 75019 Paris

Du 24 octobre au 24 novembre 2013. Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h, relâche le lundi. Tél : 01 53 35 50 00. Durée : 1h20. Dans le cadre du Festival d’Automne à Paris.
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