La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -337-Yvann Alexandre : la vertigineuse liberté d’un futur ex-chorégraphe

En homme « heureux et apaisé », Yvann Alexandre lève le voile sur ses nouvelles aspirations…

En homme « heureux et apaisé », Yvann Alexandre lève le voile sur ses nouvelles aspirations… - Critique sortie
Crédit : Mathilde Guiho Yvann Alexandre,

À parcours précoce, décisions matures, rencontre avec Yvann Alexandre

Publié le 24 octobre 2025 - N° 337

2026 se caractérise par deux événements pouvant paraître contradictoires : une nouvelle création et l’arrêt volontaire de la compagnie Yvann Alexandre. Que se passe-t-il ?

Yvann Alexandre : Quelque chose de profond s’est opéré en moi. J’ai fondé la compagnie à l’âge de 16 ans, il y a 33 ans. J’ai toujours évolué dans cet univers, car je danse depuis que j’ai 5 ans ! J’ai pourtant identifié des changements précis dans ma vie : en 2019, j’ai pris la direction du théâtre Francine Vasse à Nantes. J’ai aussi obtenu mon Master en direction d’équipements publics et culturels, alors que je n’avais que le brevet des collèges.  Il y a également mon rôle à la SACD, d’abord en tant qu’administrateur délégué à la danse, puis comme vice-président musique et danse. Je pense qu’une forme d’émancipation s’est mise en place : j’étais relié et assigné à une fonction de chorégraphe, et aujourd’hui, je sais que je suis plus que cette fonction. C’est une prise de conscience. En y réfléchissant, j’ai toujours agi en mettant en place des outils structurants pour la danse. Mais il y a un moment que j’attendais, celui où je me sentirais le plus heureux et le plus apaisé pour m’arrêter : le moment où tout va bien !

Concrètement, que signifie « arrêter »?

Y.A. : J’arrête la chorégraphie et la transmission par la pratique artistique. Je pense que je resterai toujours un pédagogue, un créateur, dans cette façon de transformer ce que je vois du monde. Mais j’ai fait le choix de m’arrêter de fabriquer des spectacles, de travailler des chorégraphies, de diriger des interprètes.

« Je peux être présent et utile pour la danse, et plus largement pour le spectacle vivant, d’une autre manière. »

C’est un choix fort, car la plupart du temps ces décisions sont subies. Pensez-vous que votre approche est transposable dans d’autres contextes professionnels ?

Y.A. : Mon socle profond, je l’imagine transposable comme source de créativité, d’énergie, de réalisation dans d’autres domaines. Je peux être présent et utile pour la danse, et plus largement pour le spectacle vivant, d’une autre manière. Je parle là de la direction d’un théâtre. J’ai pris cette décision il y a plusieurs mois, mais je l’ai décalée car je ne voulais pas qu’elle soit reliée aux décisions budgétaires prises par les Pays de la Loire. Je n’arrête pas parce que je n’ai plus de moyens, parce que je suis fatigué, aigri, ou que je n’ai plus rien à dire. Je choisis la fin de ma carrière. C’est une profonde sensation de liberté. Je suis heureux de cette première partie de ma vie et impatient de la nouvelle. Le lien entre les deux, c’est que les socles profonds de mon parcours de chorégraphe, sur les territoires, dans les lieux, sont le matériau de ce second cycle.

Quels enjeux souhaitez-vous défendre ?

Y.A. : Pour l’avenir, je me vois à la direction d’un lieu qui serait à la croisée de ce que j’ai défendu avec ma compagnie : l’accompagnement des artistes et la question des publics. Créer du lien constitue un trait d’union pour que la création et les rencontres avec les publics se fassent. Par exemple, la programmation solidaire Qui Vive ! que nous pilotons au Théâtre Francine Vasse à l’échelle de la métropole, c’est une de ces solutions dans lesquelles je me projette intellectuellement, pour que la création et les rencontres  aient lieu. Même chose avec Archipel, réseau que j’ai déployé entre le Québec, la France et la Tunisie, ou avec la SACD. C’est une philosophie de travail de faire que ces mobilités, ces coopérations, ces meilleures interconnaissances permettent aux artistes d’avoir un espace de création et de rencontre avec les publics, afin que les dispositifs ne s’empilent pas, mais se relient et créent des parcours.

 

Entretien réalisé par Nathalie Yokel

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