Focus -326-Au Ballet du Nord, Sylvain Groud crée "Le Banquet des merveilles"
Du chaos à l’harmonie, rencontre avec Sylvain Groud

Entretien / Sylvain Groud
Chor. Sylvain Groud
Publié le 25 octobre 2024 - N° 326
Comment est né Le Banquet des merveilles ? Sylvain Groud : Le Banquet des merveilles est né de très nombreuses […]
Comment est né Le Banquet des merveilles ?
Sylvain Groud : Le Banquet des merveilles est né de très nombreuses années d’expérience, d’échanges. Chaque atelier, chaque événement et toute adaptation aux multiples personnes rencontrées ont créé le besoin de cette pièce. J’avais très envie d’une grande forme qui puisse rassembler ce qui me pousse à aller vers les autres, vers des personnes éloignées de la culture. Elle va, je l’espère, incarner ma quête de refaire société, de retrouver un récit commun. Son sous-titre est « du chaos à l’harmonie » et j’ai besoin qu’ensemble, c’est-à-dire artistes et publics, tous les publics, nous posions la question de ce que le plateau recèle encore de pouvoir d’émerveillement.
Quelles rencontres avez-vous faites spécifiquement pour cette pièce ?
S.G. : J’ai par exemple rencontré des associations de femmes battues, à la rue, des exilés LGBT. Je voulais entendre la parole de ceux et celles qui ne sont pas considérés, pas accueillis. Toutes ces personnes étaient d’une générosité et d’une empathie déconcertantes. Ces gens qui ont toutes les raisons d’être dans l’amertume, dans le désamour, m’ont prouvé qu’aussitôt que nous faisions ensemble, que nous nous réinventions ensemble, ils étaient capables d’une incroyable résilience.
Comment le sous-titre, « du chaos à l’harmonie », se traduit-il sur scène ?
S.G. : J’ai aussi échangé avec des lycéens, le Gang des Tricoteuses ou des femmes de ménage et tous et toutes m’ont parlé, lorsque j’évoquais le chaos du monde, de l’oppression des riches sur les plus pauvres, de l’oppression des hommes sur les femmes, du racisme systémique, de l’effondrement climatique et des guerres. C’est malheureusement ce constat qui nous rassemble aujourd’hui et c’est ce que l’on verra dans la première partie du spectacle. Mais une fois ceci posé que faire ? Il y aura un moment de bascule dans lequel les artistes vont s’adresser autrement au public, dévoiler un peu de leur intimité avec simplicité et sincérité. Puis viendra le temps de l’harmonie, de casser le quatrième mur et je l’espère du bonheur, du plaisir d’être avec les autres. Il y a selon moi une urgence capitale à recréer le sens du faire ensemble, et cela doit passer par des actes, par l’expérimentation.
« Le Banquet des merveilles va, je l’espère, incarner ma quête de refaire société, de retrouver un récit commun. »
Vous retrouvez pour cette création les musiciens de la Cie du Tire-Laine…
S.G. : Fabriquer cette pièce ensemble est d’une grande logique. Je les ai rencontrés à mon arrivée à Roubaix et j’ai interprété de nombreux Between, ces duos qui marient la danse à une autre discipline artistique, avec le compositeur et saxophoniste Yann Deneque. Nous nous sommes éprouvés à l’hôpital, en usine, sur les marchés. Pour Le Banquet des Merveilles une composition originale a été créée en studio pendant que nous dansions, générée par nos énergies.
Et qu’en est-il de la scénographie ?
S.G. : Nous avons pour la scénographie et les costumes appliqué les principes de l’énergie circulaire en n’utilisant que de la seconde main. Nous voulions une grande toile qui puisse nous faire ressentir le nuage de pollution, la banquise qui s’écroule, et nous avons acquis pour cela une robe géante, mythique, de Carolyn Carlson que nous avons customisée. De la même manière, nous avons utilisé, pour symboliser la pollution, les tas de rebus créés notamment par la fast fashion, la toile noire assemblant des centaines de vêtements sombres qu’avait réalisé́e Tormod Lindgren pour le quintet Donc de ma Cie MAD. Les danseurs viennent régulièrement piocher, comme au hasard, dans cet énorme tas sur lequel gisent des pièces achetées en friperie, leur redonnant vie et panache.
Propos recueillis par Delphine Baffour
A propos de l'événement
Le Banquet des merveillesdu mercredi 13 novembre 2024 au jeudi 14 novembre 2024
Le Colisée
31 rue de l’Epeule, 59100 Roubaix
à 20h. Tél. : 03 20 24 07 07. Durée : 1h30.
Également le 5 avril au Beffroi, Montrouge, le 6 mai à La Filature, Mulhouse, le 17 mai au Théâtre Le Forum, Fréjus, le 24 novembre aux Salins, Martigues.
Ballet du Nord CCN & Vous ! 33 rue de l’Epeule, 59100 Roubaix. Tél : 03 20 24 66 66. www.balletdunord.fr