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Focus -325-Circa : 37e festival du cirque actuel !

Au croisement des enjeux du cirque d’aujourd’hui, rencontre avec Stéphanie Bulteau

Au croisement des enjeux du cirque d’aujourd’hui, rencontre avec Stéphanie Bulteau - Critique sortie  Auch
Crédit photo portrait : Ian Granjean Stéphanie Bulteau, directrice de Circa

Entretien

Publié le 25 septembre 2024 - N° 325

Circa raconte une multitude d’histoires et révèle aussi les problématiques qui traversent le cirque d’aujourd’hui. Une discipline hyper dynamique, mais un art qui cherche encore ses moyens : c’est le constat de Stéphanie Bulteau, directrice du Pôle National Cirque et de son festival.

Quelle histoire du cirque les compagnies nous racontent-elles au fil du festival ?

Stéphanie Bulteau : Quelles histoires au pluriel ! Car il n’y a pas qu’un seul fil à tirer : il y a celui des récits de soi, et surtout de comment le récit de soi peut devenir un récit collectif. Je pense à Ex-Ovo, qui fait suite à la présentation de Me mother il y a quelques années. Le spectacle était porté par des femmes enceintes circassiennes, et l’on retrouve aujourd’hui la question de la remise au travail du corps après l’accouchement. Il y a aussi des Nuits pour voir le jour, sur le parcours de contorsionniste de Katell Le Brenn, ou Le Pas Seul d’Alain Reynaud, sur une vie de clown. À côté, existent bien sûr des projets très collectifs, avec le Cirque des petites natures, ou Radio Maniok. Cette année, on voit émerger le répertoire qu’on souhaite refaire dialoguer avec le monde d’aujourd’hui. Ainsi Raphaëlle Boitel reprend La Bête Noire, solo de 2017, en diptyque avec la création d’un solo au vélo acrobatique, Petite reine. Enfin, le troisième fil que l’on a pu tirer, c’est celui de la création lituanienne : un cirque très proche de la performance, pas dans le sens de la virtuosité, mais au sens d’actes artistiques transversaux.

« Nous travaillons sur un nouvel enjeu de rapprochement et de croisement entre et avec les écoles de cirque. »

Crédit photo spectacle : Pierre Planchenault
Des nuits pour voir le jour, un « auto-corps-trait » de Katell Le Brenn

De nouveaux enjeux viennent-ils percuter les chantiers que vous aviez ouverts ?

S.B. : Nous avons initié une réflexion l’année dernière sur la transformation écologique et l’adaptation à un monde changeant. Nous avons effectué notre bilan carbone 2023, qui sert de point de départ. Cela nous impose des choix dans notre logistique de festival et peut parfois impacter nos choix de programmation. Ensuite, d’autres collègues comme la Verrerie d’Alès se sont emparés des questions d’ingénierie du chapiteau de demain et des nouvelles énergies. Et puis nous restons attentifs à la notion de parentalité, notamment à travers la programmation. Cette année, nous travaillons sur un nouvel enjeu de rapprochement et de croisement entre et avec les écoles de cirque et l’ensemble du festival, qui va influer sur la façon dont les jeunes vivent le festival. Une nouvelle logistique va modifier l’organisation de l’accueil de la FFEC (Fédération française des écoles de cirque) et de la FEDEC (Fédération européenne des écoles de cirque), qui seront réunies sous deux chapiteaux à Endoumingue. Les élèves pourront mieux se voir, se croiser, s’entraîner ensemble.

Car Circa reste aussi le rendez-vous des écoles de cirque…

S.B. : Évidemment. Cette année, je me réjouis d’accueillir pour la première fois l’Académie Fratellini, dans une création avec la compagnie MazelFreten. La question de la formation reste hétérogène en France. Alors que le Pop Circus à Auch cartonne, d’autres écoles du Gers sont en grande difficulté. Comment fonctionner correctement sans faire appel à des tarifs prohibitifs, comment payer convenablement les gens ? La question du financement est complexe. L’État a créé une troisième école supérieure avec l’Esacto’Lido, mais sans moyens adéquats, il est difficile de structurer son projet. Ce qui m’intéresse d’observer, en regardant tous ces étudiants sortir de ces écoles supérieures, c’est comment nous sommes en capacité d’accompagner leurs projets. Mais nous n’y sommes pas du tout. Le cirque aujourd’hui est une discipline hyper dynamique qui remplit les salles, qui réfléchit à divers mouvements d’évolution artistique en termes d’écriture, de transdisciplinarité, mais c’est un art qui manque de moyens…

 

Propos recueillis par Nathalie Yokel

A propos de l'événement

Circa : 37e festival du cirque actuel !
du vendredi 18 octobre 2024 au samedi 26 octobre 2024


Tél. : 05 62 61 65 00.

 

À ne pas manquer 

Trop peu diffusés la saison dernière, ces spectacles méritent qu’on s’y attarde : Huellas, la dernière création de Mathias Pilet et Olivier Meyrou, V, le solo de Viivi Roiha (premières en France), Suzanne : une histoire du cirque d’Anna Tauber. Quant à la Cridacompany, elle vient créer Tapage à Circa.

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