L’Absolu, écrit et mis en scène par Boris Gibé
Dans un « Silo » en tôle de neuf mètres de [...]
Théâtre - Festival /PERFORMANCES
Et si l’on regardait un peu du côté de la Suisse pour retrouver le goût d’imaginer. Tant artistique que politique, un exemple qui nous vient de Genève, le Grütli.
Lundi 14 janvier, le Grütli est occupé par un collectif de soutien aux MNA (mineurs non accompagnés) qui revendique pour ces jeunes migrants une prise en charge digne de ce nom par l’état fédéral de Genève. Ici, peu de chances qu’on fasse appel aux forces de l’ordre pour les en déloger. La semaine précédente s’est déroulé dans le même lieu un événement 100% gratuit, trois jours de propositions aux confins du théâtre et de la performance, aux formes étonnantes et variées. Depuis un an et demi qu’il a été confié à Barbara Giongo et Nataly Sugnaux-Hernandez, ce lieu culturel genevois, qui regroupe associations, cinéma et spectacle vivant, tente de faire bouger les lignes dans de nombreuses directions. Du côté du soutien aux artistes avant tout, que ces ex-administratrices de compagnie proposent systématiquement d’accompagner en production et en diffusion. Mais aussi dans la volonté de questionner les règles de la billetterie. Ces trois jours gratuits sont la préfiguration d’un désir plus large. « Je voudrais montrer aux autorités que la billetterie coûte presque autant qu’elle ne rapporte. En fait, je fantasme que toutes les représentations de l’année soient gratuites » confie Nataly Sugnaux-Hernandez. D’ores et déjà, le Grütli propose un abonnement à seulement 100 francs suisses, environ 100 euros, qui permet de voir toute la programmation de la saison.
Ici, le féminin pluriel l’emporte
Côté esthétique, la volonté des directrices pour ce premier mandat de trois ans est de ne pas avancer avec une ligne directrice marquée. « On veut avoir tiré un premier bilan pour mieux se positionner ». La programmation, à 85% féminine, tranche cependant déjà d’avec celle plus classique de la direction précédente. Pour témoin ce Go, Go,Go, qui privilégie des spectacles majoritairement aux allures de performance, champ artistique multiforme en lui-même. D’un riche paysage, on retiendra notamment le Sans Grace porté par Kayije Kagame, facétieuse comédienne formée à l’ENSATT, qui tient les spectatrices (au Grütli, on remplace le masculin pluriel par le féminin pluriel) en respect sans jamais les regarder, avant que son visage ne s’éclaire au salut d’une grâce enfantine. Premier volet d’un diptyque construit avec la comédienne Grace Sery, ce seule en scène mélange réalité et fiction, l’histoire d’une femme de ménage dans un théâtre et le texte des Bonnes de Genet, voix enregistrée et présence immobile, quasi menaçante d’une Kayije Kagame à la présence remarquable. Ou encore le Unfortunately still without any title, performance en duo de Robin Lescouët et Dominique Gilliot, où le premier caparaçonné tel un joueur de foot américain lance à l’aveugle des boules de pâte à modeler qu’il relie par un fil entre des pyramides de saladiers, vases et autres mazagrans empilés qu’il est sans cesse sur le bord de renverser. D’un suspense à la Hitchcock et d’une drôlerie qui doit tout hasard, cette funambulerie cocasse vient – cocorico – du Théâtre de Poche d’Hédé-Bazouges. Une passerelle entre la France et le Grütli comme il serait bon de les multiplier.
Eric Demey
Festival Go,Go,Go du 9 au 11 janvier. Tel : 41 22 888 44 88
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