La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Caubère à l’Athénée

Caubère à l’Athénée - Critique sortie Théâtre Paris Athénée Théâtre Louis-Jouvet
Philippe Caubère. Crédit : Gilles Vidal

Athénée Théâtre Louis-Jouvet / Le Bac 68 et La Danse du diable / de et avec Philippe Caubère / L'Asticot de Shakespeare / textes Shakespeare, Baudelaire, Giono, Jankélévitch, Caubère, Caussimon, Joe Cunningham, Clémence Massart / créé et interprété par Clémence Massart / mes Philippe Caubère

Publié le 26 septembre 2016 - N° 247

Prince de l’autofiction et acteur solaire, histrion fantasque et monstre logorrhéique, Philippe Caubère revient avec tout l’aréopage truculent qui peuple l’odyssée de Ferdinand Faure, pendant que Clémence Massart asticote la mort, en textes et en chansons.

« Le petit asticot va danser au-dessus de la tête de Philippe comme un esprit malin ! » Clémence Massart

 « Clémence est comme un double : rien n’a jamais pu entamer cette gémellité. » Philippe Caubère

 Pourquoi ce retour à l’Athénée ?

Philippe Caubère : Après La Danse du diable, qui a très bien marché, Patrice Martinet m’a proposé des représentations supplémentaires, mais le théâtre était en travaux pendant un an et j’ai dû prendre mon mal en patience. Entre temps, j’ai créé Le Bac 68 l’été dernier, au Théâtre des Carmes. Le reprendre, alors qu’il était devenu un spectacle à part entière, me permettait d’alterner avec La Danse du diable, plus long. Je reviens donc avec cette reprise et cette création pour continuer le compagnonnage avec l’Athénée et l’étrenner dans sa nouvelle rutilance ! L’Asticot de Shakespeare, dans la petite salle, est une façon de compléter le panel !

Reprise ou continuité ?

P. C. : On me pose souvent cette question, et souvent avec ironie. J’y répond en disant que deux références me guident : Ariane Mnouchkine, qui parle à propos du théâtre de l’écriture des acteurs, debout, vivante, toujours en mouvement, toujours en train de se faire, et Raymond Devos, qui semble avoir joué toute sa vie le même spectacle alors que, là encore, chaque épisode scénique n’était qu’une étape de l’écriture. Prenons Le Bac 68. L’épisode figurait dans les précédents spectacles ; pourtant, le texte a profondément changé. Les choses évoluent, ne serait-ce qu’avec la situation historique. Jouer l’irruption de 68 et de ce mouvement de libération est très important dans la situation actuelle qui ressemble – je trouve – à celle d’alors.

Après vos débuts au Théâtre du Soleil, vous vous retrouvez ensemble à l’Athénée…

Clémence Massart : Ce sont des retrouvailles sans en être ! Nous allons jouer aux mêmes heures : le petit asticot va danser au-dessus de la tête de Philippe comme un esprit malin ! C’est passionnant de jouer ensemble, dans un même théâtre, accueillis par Patrice Martinet que nous avons en bonne amitié. C’est un peu comme une boucle qui se boucle ! Ce baroud d’honneur de l’asticot – qui pioche dans des textes croquignolets sur la mort – est à la fois la mort de quelque chose et peut-être le début d’une nouvelle collaboration à venir, qui sait… En tous les cas, c’est très touchant.

Qu’est-ce qui vous lie tous les deux ?

C. M. : La vie s’écoule, la vie s’écroule, on prend de l’âge ; pourtant, on a toujours la même envie de jouer. Le temps passe et on continue, pied au plancher, en n’étant plus agrippé à la vie de manière pathétique comme on l’est quand on est jeune. Avec Philippe, on s’est rencontré, on a vécu ensemble, on s’est séparé, mais nos routes se sont toujours croisées. On rigole toujours autant. Pouvoir rire de ses échecs, de la mort, de toutes les misères qu’on a connues est une victoire sur la mort. Il y a un mouvement pendulaire de la vie, qui va, vient, et quand ça frémit, on se retrouve. Nous sommes liés par le théâtre et nos goûts communs. Nous sommes sortis du même œuf ; arrive aujourd’hui le moment de nous retrouver dans le même théâtre. On peut dire que c’est de l’amour, ou autre chose, on ne sait pas dire ce que c’est, sinon un attachement et un profond intérêt pour le travail de l’autre. C’est une œuvre au noir qui se travaille malgré nous, et nos spectacles sont comme des frères qui n’ont rien à voir mais ont quelque chose de baroque en commun.

P. C. : Clémence est la seule personne avec laquelle je fais un travail qui n’est pas le mien, avec qui je fabrique des spectacles. Je ne sais travailler qu’avec les gens que j’aime ; je n’ai pas d’imagination avec ceux que je ne connais pas. Clémence est comme un double : rien n’a jamais pu entamer cette gémellité. Quand je la fais jouer, c’est une part de moi-même que je mets en scène, exactement comme c’est une part d’elle qui joue quand elle me regarde improviser. Notre relation est bien au-delà de l’amour ou de la conjugalité. C’est une profonde affinité sensible, sensuelle, intellectuelle, familiale qui s’incarne. L’Asticot de Shakespeare est un spectacle d’actrice et Clémence est une actrice qui ne ressemble à aucune autre. Jusqu’à présent, nous n’avions pas trouvé l’occasion de nous trouver réunis dans le même théâtre. Avant de nous retrouver dans un même spectacle – ce dont je rêve, même s’il nous faudra apprendre à accorder nos maniaqueries – la réunion de l’Athénée est déjà un beau cadeau.

Catherine Robert

A propos de l'événement

Caubère à l’Athénée
du mardi 4 octobre 2016 au dimanche 20 novembre 2016
Athénée Théâtre Louis-Jouvet
7 Rue Boudreau, 75009 Paris-9E-Arrondissement, France

Le mardi à 19h ; du mercredi au samedi à 20h ; dimanche à 16h. Tél. : 01 53 05 19 19.

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