Hassan Tess, clown aux prises avec l’absurde dans « Monsieur Jean ou l’homme poubelle ».
Dans Monsieur Jean ou l’homme poubelle, [...]
Après parmi d’autres pièces les magistraux Antoine et Cléopâtre et Sopro, ou l’ample théâtre documenté de Dans la mesure de l’impossible, le directeur du Festival d’Avignon Tiago Rodrigues crée La Distance, touchante exploration d’une relation entre un père et sa fille, admirablement interprétés par Adama Diop et Alison Deschamps.
Séparation ne veut pas dire oubli… D’un côté un père qui a tant de choses à dire à sa fille partie loin, très loin. Le sol a la couleur jaunâtre d’une poussière de désert. Quelques vinyles et livres subsistent, bribes d’une richesse immatérielle qui ne se consomme pas mais habite les souvenirs et les cœurs. Au centre de l’espace circulaire, tournette qui s’enclenche à diverses reprises, un tronc couché ceint de branches mortes rappelle à quel point la terre a été abîmée. De l’autre côté sa fille qui plutôt que changer le monde a décidé de « changer de monde », ce qui signifie s’installer sur Mars, perdre la mémoire, vivre une vie strictement utilitaire et égalitaire, organisée ou plutôt régie par de toutes-puissantes Corpo-Nations. Le père et la fille, à la fois implacablement éloignés et profondément reliés, s’écrivent, éclairent des visions du monde divergentes mais révèlent aussi l’intensité de leur amour.
Entre mémoire et oubli de ce qu’est être humain
Au cœur de ce dispositif très lisible, la miniature se déploie avec simplicité et profondeur, ancrée dans les questionnements actuels sur la nécessité de changer de paradigmes pour sauver la planète et ses habitants. Tiago Rodrigues a choisi une forme de parabole sans résolution, de conte sans happy end où une science-fiction de l’intime appelle à la réparation, ouvre vers des enjeux qui concernent ardemment le futur de l’espèce humaine (nous sommes en 2077, soit dans pas si longtemps que ça…). Toujours juste, Adama Diop est remarquable d’émotion plus ou moins contenue. Digne et élégant dans son costume marron, il exprime un amour paternel qui touche profondément. L’interprétation d’Alison Deschamps est elle aussi impressionnante, dans une tension entre détermination et vulnérabilité. Une pièce émouvante, qui transforme les conflits de génération en appel à préserver notre bien commun.
Agnès Santi
à 12h, les 9, 12, 16 et 19 à 12h et 17h30, relâche le jeudi. Tél : 04 90 14 14 14. Durée : 1h45.
Dans Monsieur Jean ou l’homme poubelle, [...]
« C’est un procès pour l’ensemble des femmes, [...]
Dans le cadre du projet Démonter les remparts [...]