Blanche Aurore Céleste
Le directeur du Théâtre des Halles fait [...]
La compagnie Kumulus orchestre un ballet de fantômes blancs à la lisière du monde, où finissent les encombrants matériels et humains. Une dénonciation percutante et émouvante de notre société qui ne sait pas recycler l’échec.
Sensible au travail de Pina Bausch et Alain Platel, Barthélemy Bompard, fondateur en 1986 de la compagnie Kumulus, crée des spectacles en milieu urbain, adaptable à divers lieux, afin de partager ses révoltes avec le plus large public. Après notamment Les Pendus et Itinéraires sans fond(s), la compagnie met en lumière à nouveau les exclus et les condamnés. Une grande benne de déchetterie est posée dans un espace urbain indéterminé : des hommes-débris en sortent et en extraient divers objets comme autant de réminiscences d’un passé vécu. Cage à oiseaux, globe terrestre, bonbonne de gaz… bientôt jonchent la scène.
Etres mis au rebut
Ce dernier opus est une allégorie grinçante et poignante de notre société de la réussite, un bal ralenti d’ombres blanches usées, rythmé par « un silence hurlant de sons, de chocs, d’objets traînés au sol et de rencontres muettes ». Le comédien et metteur en scène orchestre le ballet de ces corps inquiets et apeurés, ces corps mis au rebut et évacués, évoquant parfois l’exceptionnel May B de Maguy Marin. Ces encombrants matériels et humains – vieux, poètes, chômeurs… – sont en route vers le néant et les hommes font encore vivre les derniers souvenirs et les derniers rêves avant l’oubli. A l’écart d’un monde de performance et d’objectifs chiffrés, ces fantômes dérisoires, imperturbables dans leur solitude et leur ronde hésitante, encore vivants malgré leur mort effective, émeuvent profondément.
Agnès Santi
Le directeur du Théâtre des Halles fait [...]