La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Classique / Opéra - Entretien

Quatuor Debussy : Hommage aux compositeurs de Terezín

Quatuor Debussy : Hommage aux compositeurs de Terezín - Critique sortie Classique / Opéra Chevreuse Eglise Saint-Martin

FESTIVAL D’ILE DE FRANCE / YVELINES

Publié le 4 septembre 2014 - N° 223

Ouvert en novembre 1941 au nord de Prague, le camp de Terezín fut une antichambre d’Auschwitz et un prétendu « camp modèle », outil de propagande, où les nazis laissèrent se développer une certaine vie culturelle, en dépit de conditions d’existence inhumaines, et en particulier une vie musicale animée par des musiciens juifs de premier plan. Le Quatuor Debussy s’est fixé comme projet de se vouer, au disque comme au concert, à des compositeurs auxquels la postérité et l’histoire n’ont toujours pas rendu l’hommage qui leur est dû, en raison de leur destin et de leur grand talent.

Comment est né, pour les interprètes que vous êtes, cet intérêt pour les musiques composées dans l’enfer de Terezin ?
Quatuor Debussy :
Nous avons découvert cette musique lors d’une commande du Musée de la Résistance à Lyon, qui organisait une exposition sur le ghetto de Terezin en 1998, et qui souhaitait une programmation musicale des œuvres des compositeurs internés. Un disque a été édité pour donner une seconde vie à ces œuvres (ndlr : Le masque de la barbarie, des musiciens à Theresienstadt, 1941 – 1945 – Production Ville de Lyon / Centre d’histoire de la Résistance et de la déportation). L’intensité musicale de ces œuvres nous a donné l’envie de les inscrire à notre répertoire.

Vous jouerez lors de ce concert du festival d’IDF des œuvres de compositeurs peu connus du grand public mélomane et des interprètes…
Quatuor Debussy :
Toutes les œuvres proposées dans ce programme ont donc pour dénominateur commun Terezin. D’Erwin Schulhoff, proche du mouvement dadaïste allemand, considéré très tôt par le régime nazi comme « dégénéré » et dont le père finit sa vie au sein de ce ghetto, à Viktor Ullmann et Gideon Klein qui furent internés à Terezin tout en continuant d’écrire de nombreuses œuvres – dont celles interprétées dans ce programme – et Frantisek Domazlicky, compositeur tchèque, qui, contrairement aux deux autres, parvint à sortir vivant de la barbarie nazie. Dans l’enfer du ghetto, ces artistes ont offert la quintessence de leur art à un public exigeant que chaque note raccroche à la vie.

« Dans l’enfer du ghetto, ces artistes ont offert la quintessence de leur art à un public exigeant que chaque note raccroche à la vie. »

N’y a-t-il pas à vos yeux, comme aux miens, un drame dans le drame, ou un drame après le drame, puisque ces musiciens ont continué d’être globalement ignorés après la 2ème guerre mondiale, comme si le rejet des nazis avait perduré, avait continué d’agir au-delà d’eux. Comment expliquez-vous cet oubli ?
Quatuor Debussy :
Ces compositeurs sont presque tous morts en déportation sans avoir pu achever leur œuvre. Ils ont été oubliés par l’Histoire de la musique pendant longtemps. Ces dernières années, le travail de fond de quelques fondations et historiens a pu mettre en lumière cette musique mais l’injustice perdure dans les programmations des théâtres et des festivals. Nous sommes heureux que le festival d’Ile de France ait accepté notre proposition et nous continuerons à défendre cette musique, en la proposant dans nos programmes ou l’intégrant dans des spectacles de théâtre musicaux, comme nous l’avions fait dans le spectacle mis en scène par Jean Lacornerie à partir d’une œuvre de Klabund.

Parlez-nous de l’œuvre du compositeur français Pascal Amoyel qui est aussi au programme de votre concert…
Quatuor Debussy :
Œuvre de commande pour la Maîtrise de la Loire, Pascal Amoyel a écrit le Kaddish de Térézin pour chœur d’enfants et orchestre en 2009. Il en a fait la transcription pour quatuor à cordes à notre demande pour le festival Cordes en ballade en Ardèche en 2010 dont il était le compositeur en résidence. « Il s’agit d’une prière pour les morts (kaddish) en hommage aux enfants de Térézin, où s’organisaient des concerts avec de nombreux artistes détenus, et avec les chœurs d’enfants qui répétaient tout au long de l’année, en voyant régulièrement partir plusieurs d’entre eux pour Auschwitz… » a expliqué Pascal Amoyel.

Propos recueillis par Jean Lukas.

A propos de l'événement

Quatuor Debussy : Hommage aux compositeurs de Terezín
du dimanche 21 septembre 2014 au dimanche 21 septembre 2014
Eglise Saint-Martin
3 Passage du Prieuré, 78460 Chevreuse, France

Avec le Quatuor Debussy, composé de Christophe Collette, premier violon ; Marc Vieillefon, second violon ; Vincent Deprecq, alto ; Fabrice Bihan, violoncelle ; et le Chœur d’enfants Polysons, dirigé par Elisabeth Trigo.

Eglise Saint-Martin, 3 Passage du Prieuré, 78460 Chevreuse. Dimanche 21 septembre à 16 h. Tél. 01 58 71 01 01 Places : 13 à 18 €.

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