Le Munstrum Théâtre continue de faire tourner son « Makbeth » d’après la tragédie shakespearienne : rêverie macabre et spectacle total
Le Munstrum, talentueuse compagnie co-fondée [...]
Pour son premier spectacle personnel, Louise Chevillotte s’empare de Quand je ne dis rien je pense encore de Camille Readman Prud’homme. Au diapason de la poésie de l’autrice québécoise, attentive aux petites choses de la pensée et aux fragilités de l’être, la comédienne déploie une forme simple et délicate.
En entrant sur scène à pas feutrés, avec en mains un bouquet de fleurs et sur le dos un manteau qui lui donnent l’air d’une visiteuse, Louise Chevillotte nous renseigne d’emblée sur la manière dont elle conçoit sa première création personnelle. La jeune comédienne, que l’on a pu voir au théâtre auprès d’Émilie Capliez, Marie Fortuit ou encore Patrick Pineau et au cinéma chez Philippe Garrel, Nadav Lapid ou Paul Verhoeven, fait son entrée en mise en scène avec l’humilité de qui sait toute entreprise théâtrale fragile et éphémère, ennemie donc de toute prétention au définitif, au grandiose. C’est d’ailleurs d’abord au cours d’une lecture radiophonique dans le cadre des Fictions de France Culture que Louise Chevillotte s’empare de Quand je ne dis rien je pense encore, le premier recueil de poésie de l’autrice québécoise Camille Readman Prud’homme (L’Oie de Cravant, 2021). La forme théâtrale qui succède à cette approche en garde bien des traces. Seule en scène, Louise Chevillotte déploie une partition minimaliste, où la musique de la multi-instrumentiste Léonie Pernet et les lumières de Thomas Cany sont entièrement mises au service d’une voix qui aux grandes certitudes préfère les doutes, les tremblements.
Voyage au-delà des apparences
Loin de chercher à mettre de l’ordre dans l’écriture de Camille Readman Prud’homme, dont la poésie en prose et les quelques vers libres forment une sorte de flux de conscience vagabond, Louise Chevillotte en épouse les nombreux méandres. Elle crée aussi un espace-temps singulier, qui offre au spectateur l’espace nécessaire pour s’y frayer une voie. Plongé dans un clair-obscur sans cesse changeant, le décor mi-familier mi-onirique qu’a conçu elle-même l’actrice est une subtile transposition scénique d’une page de la poésie de la Québécoise. Ses vides, ses étrangetés laissent au spectateur le temps et la liberté nécessaires pour laisser résonner en soi les pensées qui se suivent sans lien logique, et dessinent un rapport particulier au monde, où les labyrinthes et les curiosités de la pensée tiennent la place habituellement dévolue à l’événement. Reprenant la structure du recueil, dont les différentes parties s’intitulent « Sortir de chez soi » et détaillent notamment ce que le monde et les humains qui le peuplent font à la conscience de l’autrice – et par là de tout un chacun – la pièce propose un riche voyage dans une contrée trop peu explorée de nos jours, y compris au théâtre : celle qui se situe au-delà des apparences. Derrière les visages et les attitudes sociales.
Anaïs Heluin
du lundi au vendredi à 20h30, le samedi à 16h30. Durée : 1h. Tel : 01 83 75 55 70.
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