Les Guerriers Massaï, avant le départ des gazelles…

« Lorsque j’ai commencé à travailler avec Macha Makeïeff, j’ai été intrigué par le fait qu’elle considère les moments de création comme une somme de rituels, vécus et mis en œuvre par “cette tribu” (je reprends ses termes) faite d’acteurs et d’objets, dans ce lieu magique qu’est le théâtre. En parallèle, je m’interrogeais sur les formes de restitution ethnographique. Comment faire connaître au plus grand nombre ces réalités vécues, au bout du monde, par l’ethnologue et le photographe que je suis ? Comment parler de mon métier et des expériences de terrain qui le fondent ? Macha, de son côté, souhaitait depuis longtemps mettre en scène mes différents terrains d’exploration. Le théâtre est pour moi le lieu de tous les possibles. J’aime sa poésie, sa rudesse et la liberté d’expressions verbale, gestuelle, graphique qu’il permet.

Un territoire inédit entre théâtre et ethnographie

J’aime le fait de donner à voir et à entendre un discours scientifique, une poétique de la science en dehors des lieux habituels de restitution de nos connaissances savantes. J’ai coutume de dire que l’ethnologue est un glaneur d’émotions. Le récit ethnographique est une fiction qui se construit sur une réalité vécue, sur le terrain, dans sa chair, avec ses tripes. Les spectacles des Ames offensées sont composés à partir des notes et des images que je rapporte de mes voyages. Macha Makeïeff les façonne au gré des objets, des lumières, des sons, au gré de cette « fausse nuit » des salles de répétition qui est pareille à celle des initiations lointaines. Aucun discours moralisant. Seule la volonté de ramener l’humain sur le devant de la scène. »

Propos recueillis par Catherine Robert