Georgia Sinicorni présente « Nos Histoires », un texte de Frédérique Auger sur les mécanismes de l’emprise

L’emprise, c’est une thématique intemporelle, plus difficile à appréhender qu’on croit tant ses mécanismes revêtent plusieurs formes, plusieurs masques. Frédérique Auger en décrypte les rouages dans Nos Histoires à travers deux relations distinctes qu’elle tisse ensemble par un fil d’amitié salvateur. Celle de Vicky, québécoise enjouée et énergique, et de son amoureux Didier, beau et cultivé, qui va se révéler toxique et manipulateur. Celle de Maxime, sympathique gérant d’une cave à vin, et de sa mère Danielle, intrusive et castratrice, pour laquelle il travaille. Vicky et Maxime se rencontre dans son bar et au fil du temps deviennent amis. La pièce éclaire l’installation implacable autant qu’insidieuse des schémas de domination, qui ravagent l’estime de soi et asservissent l’autre, de manière plus ou moins visible, plus ou moins flagrante.

Difficile liberté

Afin de condenser le thème du double, de la part obscure que recèle chaque être, Frédérique Auger, qui est aussi l’autrice du texte, interprète les rôles de Vicky et Danielle, tandis que Jean-Charles Chagachbanian incarne ceux de Maxime et Didier. La mise en scène épurée s’appuie sur le jeu d’acteur pour révéler la puissance du vécu, qui interroge la valeur et les conditions du choix, la nature d’une liberté qui peut s’évanouir ou surgir par des voies inattendues. Nourrie par leurs expériences personnelles, la pièce est née de la rencontre entre  les trois artistes Frédérique Auger, Jean-Charles Chagachbanian et Giorgia Sinicorni, metteuse en scène du huis clos. Le travail sur l’espace et le jeu corporel révèlent toute l’amplitude des emprisonnements, laissent place aussi à la possibilité d’une transformation, d’une libération. La pièce a été saluée à Avignon Off par la critique autant que par le public, par le Prix “Coup de cœur 2023 du Club de la Presse Grand Avignon-Vaucluse”.

Agnès Santi